Durant plus de 2 mois les vacataires et contractuel.les du département de sociologie ont fait grève. Déjà mobilisé.es au sein d’un collectif de précaire crée au moment de la mobilisation contre la loi de programmation de la recherche (LPPR) au printemps dernier, iels ont décidé.es d’entamer une grève à l’autonme contre la précarité de leur statut.
Jérémy Sauvineau est contractuel, il a obtenu un contrat de 3 ans pour faire sa thèse (c’est très rare), qui arrive à terme à la fin de l’année. S’il veut continuer d’enseigner à l’université il devra le faire en tant que vacataire. Charles Rigaux est vacataire. Il s’agit d’un statut extrêmement précaire. Les vacataires sont payé.es à l’heure. Iels ne peuvent travailler plus de 96 heures dans l’année ce qui signifie qu’iels peuvent gagner au maximum 4000 € par an avec ce travail. Plus problématique encore, les vacataires doivent payer les frais d’inscription de l’université pour pouvoir y travailler.
C’est pour lutter contre leur statut précaire, mais également pour plus de moyen humain à l’université de Dijon et plus particulièrement au département de sociologie, qu’iels ont fait grève.
Un premier entretien pour revenir sur ces deux mois de grève : sur les difficultés rencontrées mais aussi et surtout sur les réussites du mouvement.
Extrait de l’entretien
J’imagine qu’il y a d’autres contractuel.les et vacataires dans d’autres départements à Dijon que la sociologie, à votre avis comment ça se fait qu’ils vous ont pas accompagné dans cette grève à ce moment-là ?
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Charles Rigaux - Il y a des situations qui sont très diverses au sein des départements à l’université et des vacataires. C’est-à-dire que nous on a la chance d’être dans un petit département, d’avoir des bonnes relations avec les titulaires et avec les étudiants, c’est pas le cas dans tous les départements. Il y a des départements dans lesquels les doctorants vacataires sont un peu plus isolés. Et ils auraient certainement risqué beaucoup plus de chose que nous à faire grève. Donc c’est compréhensible aussi de ce point de vu là parce que encore une fois c’est un statut précaire, et pour certain c’est quand même un statut qui permet de manger, donc c’est pas négligeable.
Jérémy Sauvineau - Et je crois aussi que ça montre bien la précarité structurelle qu’il y a envers les sciences humaines aussi, parce que dans notre collectif précaire on est tous de science humaine grosso modo. Et le fait que c’est nous, les sciences humaines, qui patissent en premier des réformes de l’université et de la précarité grandissante envers le petit personnel.
Cette grève est en réalité l’illustration d’une précarisation grandissante du mileu de l’enseignement supérieur et de la recherche. La loi de programmation annuelle de la recherche vient en rajouter une couche.
Ce deuxième entretien apporte une réflexion plus globale sur l’état actuel du milieu de l’enseignement supérieur et de la recherche. Charles Rigaux et Jeremy Sauvigneau évoquent les dernières grosses mobilisations ainsi que la nécessité de lutter pour une université ouverte et une recherche réellement indépendante.
Extrait de l’entretien
Jérémy Sauvineau - Il y a un journaliste qui nous a interviewé concernant notre grève et il nous a dit qu’il était surpris parce qu’il croyait que la recherche c’était une tour d’ivoire. Et je trouve que cette parole elle est vachement caractéristique, elle illustre bien ce que les gens, un peu du grand public, peuvent penser de la recherche c’est-à-dire un écrin protégé. Alors qu’en fait pas du tout, on voit que nous aussi on est rangé par des logiques de flexibilisation et on est les premiers à en patir
[...]
Charles Rigaux - Je pense que particulièrement le statut, pour le connaître actuellement, de doctorant, il est un petit peu cloisonant pour ça. Parce qu’on nous pousse davantage à réfléchir à nous-même, à nous recentrer sur notre recherche. Enfin ça c’est un discours que j’entends depuis ma première année de thèse, depuis mon premier jour de thèse c’est : concentre-toi sur ce que tu fais, et puis le reste tu verras ensuite. Sauf qu’en fait le reste faut aussi le penser aujourd’hui quoi.
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