Nous vous parlions dans notre dernier numéro, de la résistance d’Ungdomshuset, squat danois mythique qui menait depuis quelques années un bras de fer avec la Mairie de Copenhague et déchaînait la solidarité un peu partout en Europe. Sans revenir sur le projet politique porté par le lieu, nous avons souhaité donner brièvement ici quelques infos sur l’expulsion et les actions qui ont suivi, sans les mensonges et raccourcis effarants qui marquent les articles de la presse mainstream francophone qui n’avaient pas bien l’air de comprendre que la disparition d’un « repaire de marginaux » puisse faire autant de boucan.
Le premier mars, nous apprenions avec colère l’expulsion d’Ungdomshuset, l’arrestation de ses occupant·e·s, et de centaines de manifestant·e·s. Les policiers danois ont mené une opération ultra-spohistiquée à l’aide de forces spéciales anti-terroristes, qui ont atteri en hélicoptère sur le toit de l’immeuble, aspergé simultanément la façade de l’immeuble de poudre carbonique et de savon pour empêcher la visibilité et les jets de cocktails molotovs, et percé des trous directement dans le mur du bâtiment avec un engin bêlier. A l’intérieur de l’immeuble, certain·e·s des occupant·es ralentiront néanmoins au coude à coude l’avancée des forces spéciales en maintenant des barricades.
Dès l’annonce de l’expulsion, des manifestations et blocages se forment en de nombreux points de la ville. Des milliers de personnes vont occuper les rues pendant les jours qui suivront : les alternatifs de Christiana et les milieux autonomes, les jeunes pauvres et immigrés marquant ainsi le ras le bol général d’un Etat raciste et de la brutalité policière, beaucoup de « citoyen·ne·s » de gauche aussi affichant leur solidarité. Malgré les filtrages aux frontières, des arrestations massives dans les rues et des perquisitions à l’intérieur de seize autres centres sociaux et maisons collectives, l’agitation est continue. Des bâtiments sont réoccuppés puis immédiatement expulsés, des barricades, enseignes capitalistes et véhicules brûlent chaque nuit, les forces de l’ordre sont attaquées, des fêtes de rues et manifestations plus tranquilles se forment et sont diffusées en direct 24h sur 24 par les chaînes de télé danoises puis relayées dans les médias de l’Europe entière…
Il semble que la police n’ait pu gérer la surpopulation dans ses prisons, ayant atteint le record de 695 arrestations, au terme de plusieurs jours d’émeutes. Or, si certain·e·s ont été libéré·e·s, 223 personnes sont passées devant un juge, qui a décidé de mettre en détention provisoire quelque 193 individu·es (principalement d’origines danoise, suédoise et allemande, mais aussi d’Italie, des USA ou du Canada pour certain·e·s). Parmi les détenu·e·s, 28 sont mineur·e·s. Il est à noter que des renforts policiers extra-territoriaux avaient été convoqués avec notamment le prêt de véhicules policiers suèdois. Selon certains journaux locaux des observateurs policiers de divers pays européens étaient venus analyser la manière dont l’Etat danois expérimentait de nouvelles voies dans la répression massive d’occupations et d’insurrections urbaines.
Heureusement, l’expulsion d’Ungdomshuset a continué à donner lieu à des actions dans le monde entier. Des rassemblements ont eu lieu à Londres, Toronto, Berlin, Oslo, Barcelone, Madrid, Tel Aviv, Prague, Istanbul et dans d’autres villes encore. Des manifestations se sont tenues à Fredericia et Aalborg (Danemark), à Moscou, ainsi qu’à Sao Paulo (Brésil), et des ambassades ou consulats danois ont été occupés à Bergen (Norvège), Venise et Milan, où, en prime, façade et voiture du consul ont été repeintes en rose. En France, une soixantaine de personnes se sont rassemblées devant l’ambassade du Danemark à Paris, le consulat danois a été occupé à Lyon et à Toulouse. À Nantes, le consulat honoraire du Danemark a vu ses vitres brisées et sa façade recouverte d’un slogan de soutien à Ungdomshuset et aux arrêté·e·s. Pendant ce temps, les actions continuent au Danemark, après que Fadershuset (la secte propriétaire de l’immeuble) a achevé la destruction d’Ungdomshuset. Outre les manifestations quotidiennes, actions et rassemblements devant les prisons, des engins de chantier appartenant aux entreprises ayant pris part à la démolition ont été incendiés, ce qui a amené certaines entreprises à retirer leur participation aux travaux, la « petite sirène » de Copenhague a été repeinte en rose avec un signe 69, le légendaire numéro de rue d’Ungdomshuset… Le 24 avril encore, à Barcelone, le consulat danois a été attaqué par un groupe de personnes qui ont peint « Ungdomshuset : No olvidamos », sur les murs, puis lancé des bombes de peintures blanches sur les bureaux, étagères et documents et marqué d’un signe 69 les portraits de la famille royale danoise.
Le gouvernement danois avait été prévenu qu’en cas d’expulsion d’Ungdomshuset, il ne connaîtrait plus de paix... Il reste plus que jamais d’actualité de montrer sa solidarité, et de faire pression pour exiger la libération immédiate de tou·te·s les interpellé·e·s ! L’Anarchist Black Cross transmettra messages et lettres aux prisonnier·es, et recevra volontiers un soutien financier :
ABC Kobenhavn, Postboks 604, 2200 KBH-N, Danemark, info@blackcross.dk
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