À Dijon, depuis 2002, 200 caméras de vidéosurveillance ont été installées dans l’ensemble du réseau de bus Divia. Dans la logique de surenchère sécuritaire actuelle, c’est maintenant 20 caméras, reliées à un poste de contrôle où des agents de police pourront surveiller nos faits et gestes 24h sur 24, qui vont apparaître dans les rues du centre-ville. La demande de subventions a été votée dans l’urgence par le conseil municipal de novembre 2007, sans consultation ou approbation des principaux intéressés : nous autres habitant·e·s, prévenu·e·s une fois que tout est déjà acté.
Pour réagir et s’opposer à l’installation de ces caméras, à la vidéosurveillance et aux outils de contrôle en général, un groupe d’individu-e-s rejoint par des organisations, associations, commerçants du centre ville, se rassemblent dans un collectif appelé « Silence on tourne ! », qui entend organiser différentes manifestations et perturbations pour venir contrecarrer les projets de la municipalité.
Interventions aux meetings électoraux, prise de positions d’assoc’ et d’orga, diffusion de tracts, manif, projection-débat : une campagne contre la vidéosurveillance à Dijon est lancée...
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Le samedi 1er mars, sous un ciel printanier, place du Bareuzai, deux grandes banderoles se déploient au-dessus de têtes pour la plupart masquées. « Souriez, vous n’êtes pas (encore) filmés » et « Non à la vidéo-surveillance » : deux messages hostiles au projet municipal d’implantation de 20 caméras de "video-protection" (sic) au centre-ville, mais aussi plus généralement contre la politique sécuritaire et le contrôle social. Environ 300 personnes sont au rendez-vous, et le défilé démarre avec de la musique et après quelques interventions qui replacent la lutte contre la vidéosurveilllance à Dijon dans le contexte d’une résistance globale aux politiques sécuritaires.
Météo France avait prévu de la pluie, mais c’est sous le soleil que le cortège s’est baladé dans les rues du centre-ville : que ce soit pour prévoir le temps qu’il va faire ou pour contrôler et gérer les vies de leurs administrés, les dispositifs technologiques des autorités se révèlent souvent faillibles, tant mieux !
Un des côté plaisants de la manif, c’est que de nombreuxses participant·e·s n’étaient pas venus en simple consommateurs : des masques DIY aux affiches, en passant par les fausses caméras ou le PC de vidéosurveillance mobile en carton, plusieurs initiatives ont été prises pour animer un peu le cortège. Celui-ci est d’ailleurs assez pêchu avec de nombreux slogans du type « on veut pas de l’œil des condés dans nos quartiers, on veux pas de l’œil des flics dans l’espace public », ou encore « les lois sécuritaires ne nous feront pas taire ! ».
L’autre côté plaisant, c’est que les keufs et baqueux ont abandonné pour cette fois leur sale manie de venir mettre la pression en encadrant de près les manifestant·e·s. Cela dit, un ou deux RG gèrent de loin, c’est déjà trop... et il faut bien avouer que cette relative tranquillité côté bleusaille est plutôt due à une stratégie de maintien de la paix sociale qu’à notre réelle capacité à virer les flics de nos vie. Ça viendra peut-être. À noter quand même la présence d’un faux vigile plus vrai que nature qui préfigurait façon théâtre de rue ce que pourrait être la vie en centre-ville dans la société sur-fliquée que nous promet la municipalité. Cela vaudra de nombreux moments surréalistes et révélateurs de l’intégration de l’obéissance bornée et systématique à l’autorité en uniforme, comme lorsqu’il explique aux militants PS, rassemblés devant le siège de campagne de Rebsamen, qu’ils n’ont pas le droit de lire les tracts subversifs distribués par le collectif « Silence on tourne ! », que ceux-ci essaient de lui tendre les tracts en question d’un air inquiet et que le vigile les refuse en disant qu’il pourrait lui aussi avoir des problèmes avec sa hiérarchie.
Un petit tour devant la Pref, histoire de se rendre compte de ce que seront nos rues dans quelques mois si on laisse faire : 3 ou 4 caméras multidirectionnelles, image couleur et zoom intégré, qui protègent l’honnête citoyen et l’ordre républicain. Puis un arrêt symbolique devant la chouette (sa destruction en 2001 avait été le premier prétexte trouvé par les autorités pour introduire la vidéosurveillance) et devant la permanence électorale de Rebsamen.
Tout au long de la manif, de fausses caméras affichant « silence on tourne ! », sont d’ailleurs accrochées à l’aide d’une échelle au lampadaires, poteaux et panneaux de circulation ou collées sur les murs. A contrario, les vraies caméras de la FNAC, de la Préfecture, de la Mairie ou de la Chouette sont retournées, recouvertes de sacs poubelle ou de scotch, sous les cris de « abracadabra, y’a plus de caméra ! », inspirant diverses voies possibles pour aveugler Big brother.
Pour finir en musique, après quelques nouvelles interventions, une scène est installée rapidos place de la Lib’, histoire de montrer à la mairie que même leurs espaces désertifiés et livrés à la consommation dans des bars de bourges, on peut se les réapproprier ! Chanson française (les classiques : Renaud, Brassens, chants révolutionnaires) et Blues (des classiques aussi : Muddy Waters et Jimmy Cliff façon Louisianne) ont réussi à sortir les passant·e·s de leur trajectoire de consommateurices type du samedi après-m’.
Cette journée du 1er mars aura montré que se réapproprier notre ville, pour faire la fête ou pour construire des luttes politiques, c’est possible si on s’en donne les moyens. À noter que l’appel lancé par le collectif "Silence on tourne !" contre la vidéosurveillance à Dijon a déjà été co-signé par une trentaine d’associations, commerçants, collectifs militants dijonnais, et syndicats. Après cette manifestation, d’autres actions se préparent pour continuer à mettre la pression sur la Mairie et les acteurs de la vidéosurveillance à Dijon.
Vous pouvez rejoindre le collectif « Silence on tourne ! » en les contactant via l’adresse silence-on-tourne@brassicanigra.org.
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