Réveil ce matin, au son des « bip-bip » des tractopelles. Sidération de découvrir les Jardins de l’Engrenage, encerclés par les barrières et la police. Les haricots, les tomates (déjà rouges !) : écrasés, les branches des arbres : arrachées, les haies : broyées. La brutalité des engins, face aux épines des ronces.
Commandité par qui ? Pourquoi ? La ville ? Le promoteur immobilier ? Personne sur place ne veut répondre à nos questions. Personne pour dialoguer hormis la force de la police et l’acier des machines.
Alors on tient. Ensemble. On s’accroche, on grimpe, on guette. On appelle les ami·es, les voisin·es. Hier ils étaient là pour le marché, et depuis le 17 juin 2020, pour partager autour de ces jardins un instant de musique ou de pétanque... Aujourd’hui ce sont des larmes que l’on a vu dans leurs yeux. Depuis la prise de cette terre combien de conseils de jardinages, de bricolages et de menus services se sont échangés ; combien d’histoires autour de ce quartier et de la vie de ses habitant·es ! Alors on résiste, encore.
Et ça marche. Le premier tractopelle est stoppé au milieu des jardins partagés. Le deuxième à l’arrière et le troisième ne passe pas le chemin. Ce terrain chacun le connaît, s’y faufile, passe les buissons. Avec agilité, avec conviction, avec ténacité les jardinier·es s’accrochent et le défendent. Et c’est gagné pour cette fois-ci : les engins de bétonisation n’iront pas plus loin.
Un autre monde est possible. Les Jardins et le projet qu’ils portent ont été préservés aujourd’hui.
La Terre, la ville appartiennent à ceux qui l’habitent. Nous n’avons pas à subir des décisions déconnectées de nos quotidiens. Qu’en sera-t-il si nous vivons un nouveau confinement prochainement ? Nous pouvons créer une cité où chacun·e retrouve son autonomie, sa capacité à se nourrir localement, sainement. Où chacun·e à la possibilité de construire collectivement des projets cohérents, là où il vit, avec celles et ceux qui vivent autour de lui. Refusons le « toujours plus de profit », refusons l’hyper-bétonisation de nos villes, refusons les connivences politico-économiques. Laissons une place à la nature, laissons des espaces de liberté et de vie, pour la Terre et ses habitant·es.
Nous n’avons qu’une Terre, nous n’y avons qu’une Vie, semons dès maintenant pour ne plus étouffer, c’est possible. Vous entendez ? Le monde d’après pousse déjà...
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