Le préfet de la Côte-d’Or ouvre la voie au saccage des berges du Suzon



Avec le projet immobilier Venis 2 le préfet de la Côte-d’Or ouvre la voie au saccage des berges du Suzon.
Le Collectif Sauvons les berges du Suzon contestons sa décision devant le juge administratif.

Le collectif « Sauvons les berges du Suzon » rend public le dossier de Déclaration « Loi sur l’Eau » du projet Venise 2, qui confirme les graves impacts du programme immobilier sur la biodiversité du site et sur l’accroissement des risques d’inondation.

Ces éléments permettaient au préfet de la Côte-d’Or de s’opposer au projet pour empêcher la destruction de cet espace naturel. Au contraire, il a choisi de valider le dossier, ouvrant désormais la voie au saccage du site. Nous dénonçons cette décision irresponsable du représentant de l’Etat et demandons son annulation au Tribunal administratif, avec l’appui des Amis de la Terre Côte-d’Or et de France Nature Environnement Côte d’Or.

Les promoteurs Groupe Edouard Denis et 4SImmo, associés sur le projet Venise 2, ont déposé en août 2022 un dossier de déclaration au titre de la loi sur l’eau (DLE), au bureau « Police de l’eau » de la Préfecture de la Côte-d’Or.

Imposé par le code de l’environnement pour les projets d’aménagement d’une surface supérieure à 1 hectare, ce dossier est constitué d’une série d’études techniques (analyse de l’incidence du projet sur l’écoulement, le débit et la qualité des eaux superficielles et souterraines, incidence sur le milieu biologique, études géotechniques, étude zone humide,…). Nous le publions intégralement afin de permettre à toute personne intéressée de le consulter pour prendre la mesure des impacts du projet.

En effet, les 300 pages d’études qui composent ce dossier, révèlent et confirment les lourds impacts qui découleraient du projet Venise 2 : abattage de nombreux arbres, destruction des habitats de la faune présente sur le site, large imperméabilisation du sol, augmentation du risque d’inondation.

Le 27 septembre 2022, le préfet de la Côte-d’Or Fabien Sudry (remplacé fin 2022 par Franck Robine) a répondu à cette déclaration loi sur l’eau (DLE) par un arrêté de non-opposition , autorisant de fait la réalisation du projet. Peut-être a-t-il eu peur de subir le même sort que la Préfète d’Indre-et-Loire, brutalement limogée par le Gouvernement en décembre 2022 après s’être courageusement opposée à un projet immobilier qui nécessitait l’abattage d’un espace boisé ?

Au regard de l’importance des impacts et afin de protéger le site, le préfet de la Côte-d’Or aurait dû s’opposer à la déclaration du promoteur et donc à la réalisation du programme immobilier, au moins dans sa forme actuelle. Au contraire, la non-opposition préfectorale valide les risques et les impacts du projet et ouvre la voie à la délivrance du permis de construire par le Maire. En rendant ainsi possible la destruction de ce vaste espace de biodiversité faisant fonction d’îlot naturel de fraîcheur, l’Etat portera une très lourde responsabilité dans le saccage à venir !

Pourquoi le préfet aurait dû s’opposer à cette déclaration et ainsi empêcher le projet immobilier Venise 2 ?

Nous relevons trois impacts majeurs mis en évidence par la Déclaration Loi sur l’Eau de Venise 2, qui auraient donc dû amener le représentant de l’Etat à s’opposer au projet : la destruction de la ripisylve ; la destruction du milieu biologique et de la riche biodiversité du site ; l’accroissement du risque d’inondation et de ses conséquences.

1. La destruction de la ripisylve

Le plan masse du projet Venise 2 fourni dans le dossier, indique l’emplacement de chaque arbre dont l’abattage est programmé. Dans le coude du Suzon, là où les arbres de la ripisylve jouent un rôle essentiel de protection des berges contre l’érosion, le promoteur prévoit d’abattre 9 grands arbres sur à peine 70 mètres linéaires (cercles rouges sur le plan ci-dessous). Comme d’habitude, le promoteur compensera en plantant des arbres très jeunes, qui mettront 20 à 30 ans à remplir les mêmes fonctions que les arbres existants. C’est irresponsable et inacceptable.

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D’autre part, ces abattages d’arbres sont en totale contradiction avec l’engagement du Maire de n’abattre AUCUN arbre. Le 12 décembre en réunion publique à Quétigny, il a fait cette promesse : "Mais bien sûr que les berges du Suzon seront protégées, bien sûr qu’il n’y aura aucun arbre abattu." (Ecoutez la promesse du Maire)

La destruction de la ripisylve apparaît aussi clairement sur les visuels de promotion du programme Venise 2, aussi nommé « Rives du Suzon ». Ainsi, le promoteur veut vendre une vue directe sur le Suzon et promet aux futurs acquéreurs qu’ils auront « l’agréable sensation de vivre au fil de l’eau ». Mais au prix de la destruction de cet écosystème fragile que constitue la ripisylve.

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Nous notons également une incohérence entre le plan des arbres à abattre et la conclusion erronée faite dans le Diagnostic zone humide du promoteur, qui affirme que « le projet prévoit le maintien de la ripisylve en rive droite du Suzon » :

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Le bureau « Police de l’eau » de la Préfecture, qui a instruit le dossier, s’est sans doute appuyé sur cette conclusion erronée, sans regarder attentivement le plan d’abattage des arbres sur lequel la destruction de la ripisylve saute pourtant aux yeux.

Au passage, la conclusion du diagnostic zone humide explique bien pourquoi il est si important de préserver et protéger la ripisylve !


2. La destruction du milieu biologique et de la riche biodiversité du site

Dans les annexes du dossier figure une fiche « évaluation d’incidences Natura 2000 », qui précise que le site ne comporte pas d’habitat naturel d’intérêt communautaire, faisant référence à des types d’habitats précis listés dans la directive européenne Habitat-Faune-Flore de 1992.

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Mais à la rubrique « incidence du projet sur le milieu », la même fiche mentionne la « suppression de ces espaces semi-naturels ». Ils peuvent bien jouer subtilement sur les mots (« SEMI-naturel ») et s’accommoder de définitions administratives très pointues, mais la réalité est claire et sombre à la fois : Venise 2 supprimera bien des espaces naturels, qui constituent les habitats de très nombreuses espèces d’animaux, en particulier 66 espèces d’oiseaux (source LPO) et 58 espèces de papillons dont 7 espèces menacées figurant sur liste rouge. Dans le contexte actuel d’effondrement catastrophique de la biodiversité, la priorité absolue pour l’Etat comme pour la Ville de Dijon, devrait être de préserver les derniers espaces de biodiversité du tissu urbain. D’une surface de 3 hectares (30 000 m²), le site du Suzon est le plus vaste espace naturel de cette dimension encore présent au sein du tissu urbain (exception faite bien sûr des 8 hectares du Quartier Libre des Lentillères, vaillamment protégés depuis 12 ans par une occupation citoyenne qui a contraint le Maire à renoncer à son urbanisation en 2019).

D’autre part, l’urbanisation de cet espace est en totale contradiction avec le PLUi-HD de Dijon Métropole, qui dans ses Orientations d’Aménagement et de Programmation (OAP), souligne l’importance de « maintenir et développer les réservoirs et corridors de biodiversité de la trame verte et bleue (TVB) en milieu urbain  », notamment par la « renaturation de l’espace urbain » !

En page 5 du dossier OAP, le site du Suzon est identifié sur cette carte comme un «  espace stratégique pour les continuités écologiques et le développement de la TVB en milieu urbain » :

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Cette autre carte, en page 61, montre que le site du Suzon est situé sur un axe majeur de diffusion de la nature dans le cœur d’agglomération :

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En plus des impacts négatifs majeurs du projet Venise 2, le préfet de la Côte-d’Or aurait donc également pu soulever l’incompatibilité de ce projet avec le PLUi-HD de Dijon Métropole !

3. L’accroissement du risque d’inondation et de ses conséquences

Dans sa réponse de non-opposition, le préfet souligne que le projet se situe partiellement en zone inondable Bleue du PPRN de Dijon (Plan de Prévention des Risques Naturels et hydrauliques, adopté en 2015), une partie en zone d’aléa faible (Bleu Bi1) et une partie en zone d’aléa moyen (Bleu Bi2).

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Bien que cette disposition soit très discutable, le PPRN de Dijon autorise effectivement les constructions en zone Bleue.

En revanche, en zone de risque d’inondation Rouge (Ri), toutes les constructions sont interdites.

Or le PPRN souligne (p. 8-9) l’importance de « préserver au mieux les champs d’expansion des crues des cours d’eau », et précise que « pour cela les champs d’inondation des cours d’eau sont systématiquement traduits en zone Rouge, même en présence d’aléa faible d’inondation, dès lors qu’ils se situent en dehors d’un contexte urbain existant. »

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L’emprise très importante (3 ha) que constitue le site naturel de la plaine et des berges du Suzon, et le fait qu’il soit situé à proximité immédiate (900 m.) du début de la zone agricole (au nord) aurait dû amener le préfet à appliquer un principe de précaution en considérant que ce champ d’expansion naturel des crues du Suzon est de fait situé en zone non urbanisée, puisque n’étant lui-même pas urbanisé, et ainsi le considérer comme ayant un statut de zone Rouge (Ri), ce qui aurait eu pour effet de rendre inconstructible cet espace.

D’autre part, d’après le dossier de Déclaration Loi sur l’Eau, le projet Venise 2 va «  entraîner une imperméabilisation des surfaces » (p.5 et 44) d’où découlera un coefficient de ruissellement de 0,65 alors que le coefficient de ruissellement des surfaces non aménagées actuelles, est évalué à 0,30 :

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Cela signifie que les eaux pluviales s’infiltreront nettement moins qu’actuellement dans le sol. Le promoteur précise que pour les cas d’insuffisance d’infiltration (épisode pluvieux intense), il retient la solution consistant à effectuer un rejet régulé vers le Suzon pour compléter l’infiltration et éviter d’abîmer les jardins (p. 45) :

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Cette solution aura pour effet d’accroître encore le débit du Suzon en cas d’épisode pluvieux intense.

Ajoutons que le calcul du débit de fuite après aménagement a été dimensionné selon une pluie centennale par le promoteur (p. 44), après consultation du bureau de la Police de l’Eau. Pourtant, le réchauffement climatique générera (génère déjà) des épisodes pluvieux plus rares mais plus intenses que par le passé, qui entraîneront un accroissement des risques de crues et donc d’inondations, en fréquence et en intensité.

Les conséquences de l’augmentation du risque d’inondation pourraient être importantes notamment pour le quartier pavillonnaire situé immédiatement en aval du site, une centaine de maisons (quartier Charmette) étant construites en zone inondable Bleu Bi1, dont le périmètre aura donc tendance à s’étendre et l’aléa à s’accroître.

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Ces éléments montrent qu’un classement en zone Rouge (Ri) du site serait parfaitement justifié, par application du principe de précaution et avec un objectif d’adaptation aux effets du réchauffement climatique.

La décision du préfet de ne pas s’opposer au projet Venise 2 étant susceptible de recours contentieux, le collectif « Sauvons les berges du Suzon », les Amis de la Terre Côte-d’Or et France Nature Environnement Côte d’Or, ont déposé une requête en excès de pouvoir devant le Tribunal administratif, demandant l’annulation de la décision préfectorale.

Collectif Sauvons les berges du Suzon

Contact presse : alerte-beton@riseup.net



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