« Il faut rester debout ! » - Entretien avec des institutrices en grève



Interview de deux enseignantes de l’école Champollion qui nous racontent la réforme des retraites, la grève et la solidarité des parents d’élèves, mais aussi les conditions de travail dans l’enseignement et les conséquences de la réforme Blanquer.

Interview réalisée pour dijoncter.info le 15 janvier, dans la cuisine d’Aurélie.


Peut-être que vous pouvez commencer par vous présenter ?

Clara : Moi je m’appelle Clara, je suis enseignante à l’école Champollion et je suis en grève reconductible avec plusieurs de mes collègues depuis le 5 décembre.

Aurélie : Moi c’est Aurélie, je suis enseignante à l’école Champollion aussi et je fais partie des grévistes régulières.

C’est quoi les raisons qui vous ont poussé à vous mettre en grève ?

A : Moi je trouve que c’est vraiment un trop plein. Ces derniers temps, on est beaucoup à dire que c’est compliqué, que notre travail est compliqué, que nos conditions de travail sont compliquées, et au lieu d’avoir une réponse qui nous dit « On va essayer de voir ce qu’on peut faire », tout ce qu’on nous dit c’est qu’on va moins nous payer à la fin de notre carrière... Moi je l’ai vraiment vécu comme une injustice totale, c’était un peu comme un coup de massue : « Ah ben tiens, tu dis que c’est difficile, ben prend toi ça en plus ».

C : L’année dernière on a fait appel plusieurs fois à nos supérieurs hiérarchiques pour dire qu’on faisait face à des réalités compliquées avec certains de nos élèves. Y’a cette réalité-là, et derrière y’a le fait que la réforme vient nous dire qu’on va travailler plus longtemps. On a l’impression qu’on est déjà dans des processus de saturation, et on nous renvoit qu’on travaille pas assez. Alors que nous on a l’impression de trop travailler. Et en plus de ça, le fondement de la retraite c’était de pouvoir être en bonne santé pour faire des choses qu’on avait envie de faire dans la vie. Et on apprend que ça, ça n’existera pas. Donc moi je suis assez d’accord avec ce sentiment d’injustice, et je rajouterais que ça va avec la politique de ce gouvernement qui pousse à la capitalisation de tout, capitalisation des ressources, maximisation du travail,... Et en fait, ça rentre complètement en désaccord avec ce que pouvait être le fonctionnariat à un moment donné, l’idée d’avoir un salaire à vie, d’avoir une retraite, d’avoir des vacances...

Vous pensez que ce sera quoi les conséquences de la réforme pour vous ?

A : Pour l’instant, pour nous, la retraite est calculée sur les six derniers mois, donc les meilleurs de ta carrière. Quand tu commences dans l’Éduc Nat’ t’es pas payé·e énormément, t’es au SMIC, et en plus au début t’as beaucoup de frais d’essence, faut souvent que tu déménages, etc. Donc quand tu commences c’est pas facile, mais le deal de départ c’est que tu sais que tu commences mal mais que ça va augmenter. Et que c’est ton revenu final qui va compter pour ta retraite.

C : En fait, on passe des échelons, et tu sais que ta retraite elle va être calculée sur ton dernier échelon.

A : Et qu’en plus ça fait 10 ans que le point d’indice n’a pas augmenté pour le fonctionnariat. Y’a un écart avec les salariés du privé. Et du coup, maintenant, c’est toute ta carrière qui va être prise en compte, donc avec tes débuts qui sont pas bons.

C : C’est pas que ça, c’est aussi que si t’as travaillé 10 ans à mi-temps parce que par exemple t’as choisi de t’occuper de tes enfants - on peut se dire qu’évidemment si t’as un enfant à charge tu peux pas bosser plus - avec la réforme ils vont prendre en compte ces 10 années-là où t’as été payé·e à mi-traitement. Là, j’ai un document qui explique la situation dans le privé, il dit que Mathieu né en 61 va bénéficier de l’ancien système, sa pension ce sera 73 % de son dernier salaire. Matthias né en 90, sa pension ce sera 56 %. Donc on a quand même une baisse énorme...

A : Mais nous dans l’éducation nationale, les syndicats ont fait les calculs, on perdrait 25 % de notre pension, donc entre 400 et 900 euros par mois. C’est énorme. Plus l’inquiétude... Avant on savait déjà que le système de retraite c’était pas la panacée, Hollande avait déjà fait du mal, y’avait déjà l’angoisse de se dire : « Quelle énergie j’aurais quand j’aurais 60 ans ? » On voit pas mal de collègues qui sont à un an de la retraite et elles en peuvent plus, elles sont à bout. Donc c’est vraiment la question de savoir dans quel état on sera... Et puis c’est par rapport à toi, mais c’est aussi par rapport aux élèves. Eux ils méritent pas ça, ils méritent des gens qui ont de l’énergie, qui veulent monter des projets... Donc il faut penser aux fins de carrière, t’as plein d’expérience, plein de savoir, on peut penser à être moins devant les élèves et plus à accompagner les enseignant·es. Moi j’étais super naïve, je pensais qu’on allait vers un truc comme ça, mais en fait pas du tout, donc ça va être quoi ? Le burn-out, le pétage de cable ou la maltraitance des élèves. En tout cas ça donne pas envie d’y être...

Mais toi c’est un truc auquel tu penses, la retraite ?

A : Je sais pas... Je vois ça quand même assez loin, je pense au jour le jour, et je me dis qu’il faut en profiter. Mais par contre le droit à en profiter en bonne santé moi ça me parait hyper important, je m’y projette pas forcément mais par contre je trouve ça primordial d’avoir le droit d’en profiter. Et pas potentiellement te dire que c’est fini. Moi mon père il bossait à la SNCF, il a commencé à bosser à 14 ans, et il est parti à 55 ans. Il est mort, il avait pas 62 ans. Ben je me dis que je suis bien contente qu’ils aient eu ce conquis social pour profiter de ces quelques années de retraite, sinon il serait mort avant même de partir en retraite...

C : En devenant instit’, moi ça me tenait à coeur tous les acquis sociaux d’après-guerre, avec lesquels on savait qu’on avait des droits fixes, on a droit à la retraite, on a droit à la grève, on a droit à un salaire à vie, à une sécurité sociale, et c’est des choses qui étaient fixes et qui ont été obtenues. Et on a vraiment l’impression que cette réforme, et celles des gouvernements précédents, elles viennent fragmenter tout ça et faire que ce qui était des droits fondamentaux va être morcelé et qu’ils vont pouvoir agir sur pleins de variables. On aura plus « la retraite ». Maintenant il va y avoir l’âge pivot, l’âge d’équilibre, les points, etc. donc ils pourront toujours discuter la valeur du point, l’âge pivot, ils pourront toujours tout rediscuter comme ça, et donc on aura plus ces droits fondamentaux. Ce sera un truc flexible suivant les gouvernements, ils pourront descendre la valeur du point comme ils veulent... Ça va devenir une logique de marché. Moi je crois que c’est ça aussi que je trouve vraiment énervant, quelque part ce qui faisait le fonctionnariat, ce qui faisait la nature de notre statut, c’est en train de disparaître.

A : Si elle était si bien que ça cette réforme, pourquoi est-ce que les députés et les sénateurs n’en veulent pas ? Et pourquoi est-ce qu’ils ont lâché si vite sur les flics ? Parce que vraiment moi ce qui m’embête et là où ça me fait vraiment mal, c’est que c’est du flan, ils ont jamais d’arguments pour expliquer en quoi elle est bien leur réforme. Laurent Berger arrête pas de dire qu’elle est bien pour les carrières hachées. Mais moi je n’ai toujours pas compris pourquoi. Du moment où tu passes des 25 meilleures années à toute ta carrière, mathématiquement c’est moins bien.

Moi j’ai toujours pas compris pourquoi c’est mieux pour les femmes...

C : Ah si si... Leur argument c’est que chaque enfant compte. Il y aura des points de retraite par enfant. Actuellement les enfants comptent à partir du moment où t’en as trois. Là t’auras des points en plus à partir du premier enfant, sauf qu’au final c’est rien, tu pourras pas partir plus tôt en retraite (alors que c’est le cas maintenant). Ils disent : « C’est avantageux pour les femmes », alors que c’est avantageux pour les mères ! Mais toutes les femmes ne sont pas mères ! C’est des abus de langages trop bizarres...

A : Et comme d’hab, on est pas sur le fond. On parle pas d’arguments, et ça, ça me dérange. Et sur tous les niveaux. Moi j’écoute beaucoup France Inter, le matin, et je pète des plombs. C’est pauvre dans les arguments...

C : Et puis y’a quand même quelque chose qui est super important, c’est qu’en fait y’a un mouvement qui est en train de se passer financièrement, où les fonds de pension veulent pouvoir ouvrir des marchés en France et que la retraite par capitalisation c’est exactement ça. C’est rendre possible le fait que les fonds de pension qui cherchent des marchés en France en trouvent. Et ça c’est pareil, faut rabacher cet argument : on est dans une logique de marché où pour engendrer de nouveaux marchés, on va faire un projet de réforme qui transforme un système juste, fixe, qui est là depuis longtemps et basé sur des acquis sociaux qui font sens, par un système de fond de pension, et de la capitalisation privée.

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Extrait de la BD ’C’est quand qu’on arrête ?’ d’Emma.

Tu te dis que la retraite va être tellement basse que chacun va capitaliser pour soi ?

C : Oui. Et pis c’est surtout que les États-Unis disent qu’ils veulent chercher des marchés en France et là, bim un projet de réforme va obliger les gens à investir. On cotise plus, on investit. Ben c’est pas pareil, moi je veux bien cotiser mais je veux pas investir.

C’est quoi la différence ?

C : Quand tu cotises, c’est pris en compte dans ton salaire, donc tu sais que tu participes à une générosité inter-générationnelle, tu sais que tu vas servir à rémunérer des retraités, c’est pas du tout la même chose que d’investir de l’argent que tu pourras plus tard te réapproprier, t’es dans une logique individuelle, tu drives ta vie, et pour moi ça fait sens de maintenir cette solidarité inter-générationnelle, que ma cotisation serve à payer la retraite de ma grand-mère, de ta grand-mère... Et que ce soit un système sans capitalisation privée. Et ça c’est en train de disparaître. Et c’est des logiques qui vont faire que y’aura moins de solidarité et de fraternité entre les gens. Et nous on se dit aussi que y’avait des valeurs qui étaient portées par notre profession, comme la fraternité, et que quelque part nous on y tient. Pour nous c’est important que les gamins ils sentent que l’école c’est un endroit où on accorde de l’importance à la liberté, à la fraternité, on y tient. Et on a l’impression que ces réformes sont en train de faire disparaitre ces idées-là de l’école. Donc les gamins ils ont plus cette sensation-là à l’école. Parce que y’a plus besoin de croire en ça pour être instit’. Moi ça me fait flipper parce que si tout le monde en vient à être dans des logiques purement individuelles et ben on a plus la même force de transmission des valeurs qui nous sont chères à nos élèves. On les met dans un système qui est de plus en plus dégueulasse. Et ça ça participe à nous démotiver et à nous dire « mais comment on va tenir ». L’école publique ça nous parlait, mais si c’est plus le cas, on va partir.

Face à tout ça, c’est quoi votre manière de faire grève ? Vous pouvez nous expliquez comment vous vous impliquez dans le mouvement ?

C : Aurélie est syndiquée, et elle a 5 jours dans l’année où elle est informée de ce qui se passe. Donc, avant le 5 décembre, elle revient avec la niaque en nous disant : « Là les filles, ils sont en train de trop nous avoir, faut qu’on se bouge, moi je suis prête à aller jusqu’au bout. » On se dit, bon ok, et on commence à se renseigner. Au début y’a un truc qui prend au sein de l’école, on arrive 3 fois de suite à faire que l’école soit fermée, ou qu’il n’y ait qu’une seule classe qui fonctionne. Mais petit à petit, on a des collègues qui n’y croient plus. Y’a une espèce de sentiment qui s’installe que c’est déjà perdu. On a pas perdu, mais le sentiment est déjà là.

À quel moment ?

C : Avant les vacances scolaires.... Alors à quel moment du mouvement ça correspond ?...

A : Moi je dirais grosso modo au moment où Philippe [1] parle d’âge pivot, tout le monde s’est dit que la CFDT va lâcher et que ce sera perdu. Enfin je sais pas si y’a cette réflexion-là dans l’école...

C : Moi je crois pas, je crois que ça c’est un argument rationnel, mais que les gens ils se disent pas ça. Je pense que les gens à l’école ils étaient en mode : « Il faut qu’en une semaine ou deux ce soit plié, parce qu’on veut bien faire grève pendant 2 semaines, mais on fera pas plus ». Hier avec des copines on se disait que la grève ça avait changé notre rapport à la consommation. Parce qu’en fait on sait que là financièrement, ça va être compliqué, et du coup ça fait qu’à Noêl, on avait pas envie de faire des cadeaux, mais on avait envie de donner de notre temps à faire d’autres trucs. Et j’ai l’impression que c’est des choses comme ça qui font qu’à un moment donné y’a une dissociation dans l’école, c’est qu’il y a les personnes qui se disent : « Si on est pas payé c’est pas grave », et d’autres personnes qui ne peuvent pas se dire ça. Y’a des enseignantes dans l’école, elles arrivent pas à imaginer que leurs paies puissent être diminuées pendant plusieurs mois de suite. Et du coup même si on sait qu’au final on va perdre entre 400 et 900 euros sur nos pensions... Ben c’est un argument qui ne fonctionne pas...

A : Mais parce que je pense que c’est ce qu’on disait, c’est que la retraite c’est loin. Et puis je pense qu’on vit pas de la même manière. Chez moi, on a pas des salaires qui vont nous permettre d’envisager de mettre de l’argent de côté. Je suis contre la capitalisation parce que c’est pas un système qui me plait, mais en plus je sais que pour nous c’est impossible. Mais je suis pas sûre que les autres collègues se disent ça. Quand t’as un conjoint qui gagne plutôt bien sa vie, tu te dis : « Ok on perd mais pour moi, individuellement, c’est pas si grave. On mettra un peu de côté et on s’en sortira. » Y’a vraiment ce glissement du « nous » au « je ».

Et quelle forme ça prend la grève dans l’école ?

C : Y’a vraiment différentes échelles. Dans l’école on s’organise d’abord par cercle affinitaire, donc nous par exemple on est 3 ou 4 à réfléchir ensemble à ce qu’on voudrait faire. Ensuite il y a le conseil des maitres, c’est la réunion de tou·tes les enseignant·es et du directeur, où on va se dire se qu’on fait au niveau de l’école, et où on essaie de motiver les autres collègues à suivre le mouvement. Et ensuite il y a aussi l’assemblée inter-éduc avec les enseignant·es du secondaires et du primaire, où on appelle à la reconduction, on projette des actions, etc. C’est différentes échelles et il faut que les informations circulent entre ces différents niveaux. Nous on a beaucoup suivi les dates appelées par l’intersyndicale de l’éduc’, mais par rapport aux cheminots, on en est pas à notre 48e jour de grève. On est sur un mouvement de long terme, mais qui n’est pas continu. Aucun enseignant je pense n’a fait grève en continu.

A : C’est sûr que par rapport à la SNCF on est des petites joueuses, mais c’est que eux ils ont un pouvoir de blocage qui est énorme. Nous on pourrait l’avoir aussi si on était unitaire, mais on l’est pas du tout. Du coup quand t’es 4 instit’ sur 13 à ne pas faire classe dans une école... Bon ben voilà quoi...

Vos élèves sont rebasculés sur d’autres classes ?

C : Ouais, après y’en a pas beaucoup qui viennent. Parce que les parents savent que c’est la grève.

A : Il faut dire aussi que nous on a des parents géniaux, qui soutiennent à fond la grève, et que ça ça change complètement la donne. On a que des messages ou des sourires, moi j’ai pas eu un mot de travers, pas un regard de travers. C’est classe !

C : Franchement on se bat peut-être plus avec eux qu’avec certain·es collègues. On sentait que les parents nous soutenaient et on sentait aussi que pour beaucoup d’entre eux les messages du gouvernement sont imperméables, parce que y’a beaucoup de familles chez nous qui parlent beaucoup de langues à la maison, ou qui n’ont pas cette habitude-là de se confronter à l’actualité politique, à l’actualité électorale. Et du coup on s’est dit, faut qu’on organise un petit dèj’ un jour où on fait grève pour pouvoir discuter avec les parents et leur expliquer qu’on fait grève contre un projet de société, dans lequel les riches vont être encore plus riches et les pauvres encore plus pauvres. Et où la ségrégation va être encore plus forte. Parce qu’aux Grésilles, la ségrégation est déjà forte, nous on a beaucoup d’élèves qui sont dans des familles où les situations économiques sont pas simples.

A : Oui ben de toute façon ils ont pas les mêmes chances que tout le monde au départ, ça c’est sûr.

C : J’ai l’impression que le fait d’avoir utilisé d’autres mots pour leur expliquer ce qui se passait, ça a fait que les parents nous ont encore plus soutenu. Suite à ça, on les a invité à venir en conseil des maitres pour pouvoir les tenir informé·es, elles sont venues et elles sont aussi venues faire des banderoles pour organiser une journée école morte. Donc elles se sont organisées entre elles pour fermer l’école, et nous on a pu faire grève ce jour-là.

A : Et ça c’était vraiment leur idée et leur décision à elles.

C : On dit elles parce que c’est surtout avec les mamans qu’on a des rapports, on voit très peu les papas. Et là on voudrait vraiment trouver une manière de partir ensemble en manifestation depuis les Grésilles. Parce qu’on a l’impression que faire des manifestations, c’est pas quelque chose qu’elles font souvent dans la vie, mais que si on partait ensemble ça pourrait être trop chouette.

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Parce que du coup, ça se passe comment quand vous allez en manif ?

A : On a nos petits rituels. Le matin y’a les AG inter-éduc’ à la bourse du travail. Après on allait manger ensemble, on faisait nos panneaux et nos slogans, et on allait en manif.

Vous avez pas trouvé d’alliées dans d’autres écoles, dans des assemblées plus larges ou dans les manifs ?

A : Ben au niveau du REP [2] y’a une autre école où ça bouge bien, où ils ont un directeur qui fédère bien, donc ça bouge. Mais ouais, on s’est plus rencontré dans les manifs.

C : Mais si, les ag inter-éduc’ ça nous a fait rencontrer des gens, on s’est dit : « Ouah les gens de Sombernon ils sont à fond ! » Et puis on croise le prof’ de math de la fille d’une pote, y’a des rencontres comme ça qui se sont faites. Moi ce que je peux dire c’est que j’étais assez frileuse des ag inter-éduc’, je me disais que ça allait être le truc syndical un peu plan-plan, mais j’ai trouvé que finalement c’était cool et que ça avait vachement évolué pendant le mouvement. Au début ça racontait beaucoup ce qui se passait dans les autres établissement, et ça permettait de capter qui venait d’où, qui faisait quoi. Ça donnait des idées, mais une fois tout ça raconté, il nous restait 10 minutes pour ce dire ce qu’on faisait pour la suite, et là c’était l’angoisse parce qu’on avait plus assez de temps pour prévoir des actions. Mais petit à petit, y’a une logique interne qui s’est installée, sans pour autant en faire un truc très rigide, j’ai l’impression qu’on a finit par trouver une forme d’efficacité, où on arrive à prendre des décisions, où on prévoit des actions, où on vote la grève reconductible, toujours on réaffirme ce pour quoi on se bat, c’est à dire le retrait du projet. Et puis là, on en parlait hier, on a l’impression qu’il se passe quelque chose syndicalement. Y’a comme une fracture qui se dessine entre les syndicats réformistes, CFDT et UNSA, qui seraient toujours dans un dialogue avec l’État. Et de l’autre côté, FO, la CGT, Solidaires, le SNUIPP qui continuent de s’ancrer dans un mouvement populaire, qui ne se projettent pas du tout dans une forme de négociation avec l’État.

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Mais vous avez l’impression que c’est nouveau ? Parce que j’ai l’impression qu’on s’est dit la même chose pour la loi travail en 2016.

C : Ben p’têtre, mais nous on était moins là...

A : Mais oui, que la CFDT et l’UNSA lâchent, c’est depuis longtemps... On les appelle syndicats réformistes, moi je serais pour employer un autre vocabulaire.

C : Tu proposes quoi ?

A : Pff... Syndicat...

C : Lèche-cul ?

A : Gouvernementaux... Ben oui... syndicats gouvernementaux.

C : Mais je sais pas, on a toujours ce truc de dire « les partenaires sociaux », comme s’ils étaient tous là, mais en fait pas du tout... Mais oui, c’est peut-être pas si nouveau, je sais pas.

A : Nan nan, c’est clair, ça fait une paire d’année que la CFDT on sait qu’elle est pro-gouvernementale.

C : Alors peut-être que ce qui est nouveau c’est les gilets jaunes. Parce que nous dans toutes nos assemblées inter-éduc, y’a des gilets jaunes, au moins 5 ou 6. Donc en plus de cette fracture syndicale, y’a quand même cette présence. Tout le monde dit : « Les gilets jaunes nous ont prouvé que notre manière d’être dans la rue, de nous révolter, elle est pas efficace, et qu’il faut apprendre à se révolter autrement, à faire des actions. » Donc la manif syndicale, elle continue à être sur le mode que privilégie les syndicats, mais en même temps y’a de la place pour faire autre chose, pour proposer des actions, pour bloquer l’économie... Y’a vraiment ce truc assumé de dire qu’il faut faire quelque chose de l’héritage des gilets jaunes. Et genre on s’est pas bougé pendant un an alors qu’ils étaient dans la rue tous les samedis, on a loosé et là on veut être avec eux. À chaque ag inter-éduc y’a un appel à aller manifester avec les gilets jaunes le samedi. Et pour moi c’est quelque chose de nouveau, comme si les gilets jaunes c’était une entité nouvelle.

Toi t’es d’accord aussi avec ça ?

A : Ben qu’ils font partie prenante de la lutte, ça c’est clair.

Et que l’année qui vient de s’écouler a fait un choc dans la tête de certaines personnes sur les formes de lutte qui sont efficaces ou pas ?

A : Ah ben c’est clair... Ils ont montré une manière de lutter vachement plus efficace que la manif. Même si moi je pense qu’il faut les deux, il faut la manif’ et il faut des actions à fond. C’est clair.

Du coup vous arrivez à proposer d’autres formes d’actions ?

A : Ben tu vois hier ils ont proposé d’aller bloquer l’animation péda qui était prévue à Canopée, sur la fac. L’intervenant était soi-disant malade, donc ils l’ont annulé... mais ils avaient réussi à rameuter du monde !

C : Et les jets de cartables !

A : Ça c’était devant le rectorat.

C : Là ils appelaient à bloquer le rectorat pour les voeux de la rectrice ce matin. Donc ouais y’a des choses qui se font à droite à gauche. Bloquer le rectorat, ça marche tellement bien qu’ils se font des entrées souterraines pour pouvoir passer... [3]

Est-ce que vous aviez déjà traversé d’autres mouvements ?

A : Non, j’sais pas, moins mobilisée, moins à fond... Après régulièrement, j’ai fait des grèves, mais celle-là elle est assez hallucinante par son ampleur et sa durée. Elle est inédite par sa durée. Ça se trouve on va rien obtenir, mais historiquement c’est la grève qu’a duré le plus longtemps, et ça démocratiquement ça interroge. Moi démocratiquement, bon je me posais déjà pas mal de question... mais vraiment ça craint. Parce que pareil les gilets jaunes, ils ont rien obtenu non plus. Moi j’étais pas en France, j’ai vécu ça de l’étranger, mais j’ai l’impression que le prix de l’essence est encore plus haut que lorsqu’ils ont commencé alors qu’ils ont manifesté pendant un an et demi mais ils sont toujours précaires.

Ouais, mais moi j’ai l’impression qu’ils ont obtenu des choses de façon détournée. Par exemple Macron a annoncé cet été qu’il allait y avoir des subventions pour ouvrir des bars dans les villages parce que les gens avaient besoin de lieux de sociabilité, que c’est ça qui ressortait des gilets jaunes. Ou comment les discours de Rebsamen pour les élections, c’est la ligne gilet jaune : une écologie populaire. ’fin tu vois y’a une répercussion sur les discours politique et les manières de penser.

C : Disons qu’ils adaptent les discours parce qu’ils savent que les gilets jaunes sont une force de réaction maintenant. Donc ils adaptent leurs discours pour que les gilets jaunes soient pas trop vénères. C’est ça qui se passe, ça veut pas dire qu’ils font des choses pour transformer la société dans le bon sens. C’est comme là, ce projet de retraite, ils disent qu’il va avantager les gilets jaunes. Cash. Edouard Philippe il dit ça. Mais en fait, ils disent ce qu’il faut dire pour paralyser la révolte. Alors que pas du tout...

Y’a ce qu’ils disent et leurs mensonges, mais y’a aussi des choses qu’ils sont obligés de faire parce que y’a eu ce mouvement, et que ça a des répercussions sur eux. Évidemment, ils enrobent ça, ils le récupèrent pour pacifier le truc, mais ça a une influence sur eux. C’est pas comme arracher des tonnes de trucs, mais ça crée une inflexion dans leurs programmes.

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Peut-être qu’on s’attache à ça parce qu’on veut pas penser que les révoltes servent à rien... Rire

A : Nan mais en plus, même si on obtient rien, c’est pas que ça a servi à rien. Si on obtient pas le retrait, ça aura quand même servi à montrer qu’on est là, qu’ils peuvent pas faire n’importe quoi, qu’on veille au grain, que y’a plein de choses qui vont pas mais que y’a du monde, qu’on est pas tous à regarder nos pieds en espérant que ça nous touche pas. Il se passe des solidarités, il se passe des choses qui nous touchent et qui font du bien, et ça au moins on l’a vécu, et ça nous appartient. J’ai revu y’a pas longtemps un film sur un combat syndical, et la fin c’est : « On a perdu mais on s’est bien battu. » Et c’est ça qui lui a redonné la force de vivre, c’est le fait de se battre. Et j’en suis persuadée. Il faut vraiment que quand on va se retourner on puisse se dire : « On s’est bien battu. » Bien sûr, si tout le monde nous avait suivi ça aurait été plus facile, mais on s’est battu. Pour moi c’est vraiment primordial de ne pas courber l’échine. Il faut rester debout. Et moi ça me donne envie de plus connaître mes droits et de plus me défendre encore.

C : C’est ce qu’on s’est dit hier, que maintenant on irait toutes aux journées syndicales, et que notre objectif ce serait de connaître nos droits, parce qu’en fait ils nous la mettent à l’envers mais on fera tout pour leur mettre des bâtons dans les roues. Si on veut pouvoir s’opposer à l’administration de l’éducation nationale, il faut qu’on connaisse nos droits et ils font tout pour qu’on les connaisse pas, parce que c’est imperméable, c’est imbuvable. On s’est dit que le combat ça allait être aussi ça, et dès qu’il va se passer un truc, on va se battre.

Je me demandais justement ce que ça crée au quotidien le fait de se battre et d’être ensemble dans cette école ?

A : Ben ça énerve. Moi j’ai eu la gastro ! Ça crée des tensions, mais c’est un défi intéressant de réussir à prendre de la distance, à expliquer les choses et moi je suis persuadée qu’il faut qu’on s’améliore sur le fait de connaître nos droits, et de prendre de la distance pour arrêter de s’énerver. Il faut que je retrouve un calme intérieur tout en restant en lutte.

C : Nous on se dit qu’on a la chance de pouvoir travailler ensemble. De faire des projets pédagogiques ensemble, avoir une conception de la pédagogie qui se connecte. Et on veut continuer à travailler ensemble, donc il faut qu’on garde un climat dans l’école qui ne soit pas dévasté. Si on ne s’entend plus avec personne, ça va être trop compliqué. Donc même si on est énervé de ne pas être soutenues par des collègues, parce que c’est une lutte collective, ben on veut pas non plus faire des trucs contre nos collègues, parce qu’on veut continuer à travailler ensemble.

A : Et les méchants, c’est pas nos collègues. Il faut pas qu’on se trompe d’ennemi. Ceux qu’on combat c’est l’administration, c’est le gouvernement, c’est pas nos collègues. C’est pas eux qui créent cette situation. C’est important de s’en rappeler et d’unir les forces.

C : Après, nos relations entre celles qui sont impliquées dans le mouvement, ça fait qu’on se voit plus, qu’on partage plus que nos ambitions pédagogiques. Moi je crois que j’ai jamais autant appris qu’à leur contact, j’ai plus appris qu’en deux ans de formation. Mais là j’ai l’impression qu’en plus, on partage une manière de se révolter, c’est comme si nos relations elles étaient passées sur un autre plan.

A : Oui, on partage une manière de vivre en société.

C : Peut-être que ça politise nos vies, le politique a plus de place dans nos débats que d’habitude. On parle plus de comment on se voit dans le monde, de pourquoi on fait tel choix.

Et moi je me disais qu’au sein du mouvement dans l’éducation nationale, y’a beaucoup de meufs, est-ce que c’est parce que les instit’ sont très présentes ? Est-ce que ça a un impact sur les formes de lutte ?

A : Euh... Moi je l’ai pas ressenti de la même manière. C’est clair que dans le primaire y’a que des femmes, mais dans le secondaire y’a beaucoup plus d’hommes, et justement quand on a fait l’AG c’était : « Ouah, y’a des mecs ! » On a pas l’habitude nous. Donc je me suis plutôt dit : « Ah ouais ça existe des hommes dans l’éducation nationale. » Ils sont tous au collège, ou remplaçant. Et puis après dans les cortèges, quand tu vois les cheminots c’est plus masculin, après quand tu vois, la santé c’est plus féminin. C’est assez genré. Après je me suis jamais posée la question sur la manière de lutter.

C : Moi ce que je dirais c’est que dans nos assemblées, y’a énormément de femmes et dans les cortèges aussi, et je pense que ça fait que y’a largement autant de femmes qui parlent, et qu’elles n’hésitent pas à prendre la parole, et y’a pas un truc de se dire qu’on aurait pas notre place. Moi je ressens pas ça, alors que je peux le ressentir dans d’autres endroits. Du coup je pense quand même qu’être plein de femmes ça nous donne de l’aplomb face à des réactions qu’on pourrait sentir comme écrasantes.

A : Ouai je sais pas. Moi le constat que je fais c’est que quand même les métiers qui sont pas hyper bien payés sont quand même féminisés, et ça on le sait et c’est dégueulasse. On en parle chaque année le 8 mars, et rien ne change. Et ça va pas aller en s’améliorant, vu les lois qui passent.

C : Après moi je dirais aussi que y’a des types d’actions qui ont été enclenchés par des meufs et que je sens une présence féminine là-dedans. Y’a une nana qui fait beaucoup de musique et qui a dit : « Je veux qu’on monte une chorale et qu’on fasse des faux chants de Noël pendant les courses de Noël. » Elle a monté un petit orchestre et franchement elle chante trop bien, et elles ont fait un vrai truc. Elles ont fait des accompagnements pendant les chansons. Là y’a que des nanas par exemple. Et en ce moment, pareil, elles voulaient faire une danse, une choré. Et je sens que le mouvement est emprunt d’une envie d’exister par des formes que moi j’attribuerais plus à des femmes. Mais bon... Peut-être que c’est foireux de dire ça, mais je le ressens comme ça.

A : Oui ben y’a un petit combat féministe. Mais moi avec lequel je... Moi ce que je mettrais au-dessus de tout c’est de se battre pour pas se laisser faire quelque soit ton sexe en fait, juste le droit au respect, point final.

Et sinon, est-ce que vous pouvez dire deux mots des premières conséquences de la réforme Blanquer ?

A : Son truc, c’est de faire de notre directeur notre supérieur hiérarchique. Pour moi, pour vivre en société, il faut des garde-fous. Parce que dès que tu donnes du pouvoir à quelqu’un, il en abuse. Donc donne du pouvoir à un directeur, il va en abuser. Et ça va créer des tensions et des ambiances malsaines, donc il faut vraiment avoir des garde-fous pour vivre ensemble. Et Blanquer s’est attaqué à faire sauter ces gardes-fous.

Parce que le but de ça c’est d’avoir une école plus efficace ?

A : Oui, et ce qu’il voudrait c’est qu’on soit corvéables à merci. Il nous considère comme des pions. C’est comme avec les hôpitaux, ils veulent créer des grands pôles. Donc on met tout le monde dans le même endroit, pour faire des économies sur le ménage, sur des choses annexes à l’éducation, ce qui fait qu’on stresse toujours plus les gens parce qu’il faut en faire toujours plus en toujours moins de temps. Et en fait à nous regrouper tout sur place, comme on manque d’AVS [4], au lieu d’être sur une classe à plein temps, elles sont sur deux classes à mi-temps.

C : Avant, une AVS qui s’occupait de Pierre toute la journée, elle était tout le temps avec lui même quand il avait pas besoin d’elle. Et c’était quelque chose pour Pierre qu’elle soit avec lui. Alors que maintenant, dès que Pierre n’aura pas besoin d’elle, elle ira faire autre chose, s’occuper d’un autre élève. Au lieu que l’AVS travaille toute l’année avec le même élève, et s’inscrive vraiment dans une processus de confiance, là elle va avoir deux élèves et on va lui demander de faire d’autres tâches dès qu’elle sera pas pleinement occupée. Ça veut dire que y’a une multiplication des tâches, on veut que les gens soient rentable à tout moment. En fait, c’est une mauvaise vision, parce que quand Pierre n’a pas besoin d’elle, en fait sa présence fait quand même quelque chose. Elle est là pour lui. Le gouvernement refuse de reconnaître l’importance de cette continuité, du fait que Pierre sache que cette personne est toujours là pour lui. Ça va complètement changer sa manière d’être en classe, de trouver une sérénité grâce à ça.

A : Et ça c’est encore une injustice. Ces boulots-là sont hyper mal payés et ont aucune formation alors qu’ils ont une importance capitale.

C : Avec l’assemblée inter-éduc’, on a décidé que la caisse de grève soutiendrait principalement ces personnes-là, qui ont déjà des contrats et des salaire de merde.

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Là y’a une caisse de grève pour l’éducation nationale, à Dijon ?

C : Oui. Il y avait 3000 euros d’un autre mouvement qui ont été rebasculés en soutien au mouvement actuel. C’est une décision prise en assemblée. Et en plus il y a de l’argent qui a été récolté par des péages gratuits, et d’autres actions. La caisse a été mise en place par l’ag inter-éduc’, y’a une référente qui gère la caisse, qui a été choisit, et on a décidé ensemble que les AED [5] et les AESH [6] soient les premier·es à bénéficier de cet argent.

A : Et y’a aussi des caisses de grève syndicales, moi je suis à FO et on m’a déjà dit que je pourrais avoir un petit quelque chose de soutien, pas grand chose mais qui fait du bien symboliquement. Sinon dans les emplois de merde de l’éducation nationale, y’a aussi les services civiques, qui font un boulot de taré, qui font tourner l’école.

C : Et qui ont remplacé des contrats aidés, donc souvent quelqu’un du quartier, avec un vrai salaire et des vrais horaires. Les services civiques, ça n’a rien à voir, ils sont au service du directeur, ne peuvent négocier aucun aspect du contrat... Et pourtant c’est eux qui font tourner l’école. Et je sais aussi que la réforme Blanquer, ça implique aussi des trucs de fou dans les campagnes, justement lié aux regroupements d’établissements. Et ils parlaient aussi de regrouper des pôles, école primaire - collège pour avoir une seule cantine. C’est pour faire des économies, alors que c’est fondamental dans la manière dont les enfants se sentent à l’école. La récré c’est pas du tout la même si tu la partages avec des collégien·nes...

A : Sinon sur les autres conséquences, on peut parler du dédoublement des classes en REP. Franchement c’est bien d’avoir fait ça, on travaille mieux, on peut accorder du temps à des gamins. Sauf que y’a aucun moyen qui a été mis pour assurer ce dédoublement, donc ils sont allés prendre des gens dans le rural et dans les maternelles. Et les maternelles sont les sacrifiées de cette réforme, elles sont blindées... Là y’a des parents d’élèves qui ont fait une lettre pour dénoncer les conditions d’accueil et de travail dans une école, parce qu’ils ont fermé une classe et sont passés de 24 à 29 élèves par classe. Les parents décrivent des conditions humaines vraiment pas terribles pour les enfants, et l’administration leur répond en se cachant derrière des « Ouai mais c’est comme ça, c’est la loi, la loi nous oblige pas ». C’est vraiment une déshumanisation des choses...

Pour finir, je me demandais si vous aviez envie de raconter un moment de la lutte un peu marquant, un peu chouette, qui vous a donné de l’énergie ?

A : Et ben tu vois, mardi, on a fait grève, y’avait pas grand monde donc grosse déprime. En plus, au départ, FO nous annonce qu’il y a un délégué syndical dans un supermarché qui s’est suicidé... Donc le truc qui te calme... On est arrivé place Darcy, on s’est mis à discuter, et puis y’avait des jeunes, genre 15 ans, sur le côté, sur le trottoir. Je leur fais : « Alors les jeunes vous manifestez avec nous ? » Et une copine leur dit : « Vous savez pourquoi on manifeste ? » Et elle leur explique ce que c’était la retraite avant et ce que ça risque de devenir. On a bien vu qu’on les gonflait un peu, mais ils sont restés, ils ont écouté jusqu’au bout. Je sais pas ce qu’ils en ont gardé... On leur a dit qu’il fallait pas qu’ils se laissent faire. Et je me dis que c’est des petits moments de rencontre comme ça, qui vont pas changer la face du monde, mais que je trouve chouettes et qui font du bien.

C : Moi je dirais que mon moment préféré... C’est euh... je sais pas...

A : Moi si je peux en avoir un deuxième, c’est quand les mamans elles ont bloqué l’école... Franchement c’était magique... Extraordinaire, moi ça m’a porté... Ça m’a donné une énergie pendant des semaines. Et même encore aujourd’hui, quand je suis un peu patraque, j’y pense et je me dis que c’était la grande classe... !

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Interview réalisée pour Dijoncter.Info, le 15 janvier, dans la cuisine d’Aurélie.



Notes

[1Édouard Philippe, le premier ministre.

[2Le Reseau d’Education Prioritaire. Aux Grésilles, plusieurs écoles sont mises en réseau pour des projets communs.

[3Nous sourions en imaginant le personnel du rectorat creuser un tunnel à la pelle, il s’agit en réalité d’une entrée de parking souterrain.

[4Auxiliaire de Vie Scolaire, c’est-à-dire, personne qui accompagne des élèves en maternelle ou des élèves handicapés.

[5Assistants d’Éducation, c’est à dire les « pions ».

[6Aides aux Élèves en Situation de Handicap.

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