Mutinerie à la maison d’arrêt pour femmes de Dijon



On pourrait se dire qu’une personne enfermée en prison est en train de payer sa « dette » à la société , mais celle-ci comprend-t-elle aussi les traitements que l’on n’imaginerait pas infliger aux chiens ?

Il n’est pas question ici de dire qu’une prison à visage plus humain la légitimerait, mais le fait est qu’elle existe et que cela n’empêche pas de dénoncer les conditions d’incarcération pour mieux, entre autres, en cerner les limites.
Justement, à Dijon les prisonnières de la maison d’arrêt des femmes (MAF) ont exprimé leur ras le bol dans la journée du 29 avril pour dénoncer l’arbitraire, les abus et autres injustices. Ça a été matelas brulés, refus de restitution des plateaux, boucan avec plateaux..., mais aussi, et malheureusement, mitard, tabassage en règle, intervention des ERIS (super maton) et pour conclure tout ça éloignement géographique. Au début, plusieurs petits faits, qui en s’accumulant se sont transformés en colère.
D’abord, il y a les parloirs, peu nombreux du fait de l’éloignement géographique. De nombreuses prisonnières sont en détention loin de leur lieu de vie habituelle, ce qui joue en défaveur des visiteur-se-s potentiel-le-s. Il y a également le fait que beaucoup de prisonnières à la MAF de Dijon souffrent de toxicomanie, et sont enfermées sans traitements de substitution. Viennent s’ajouter à cela les problèmes liés aux activités proposées et leur mauvaise gestion. Outre le fait qu’il faut souvent attendre plus de deux mois pour avoir droit à une activité, celles-ci sont peu nombreuses et offrent souvent un programme limité et qui renseigne bien sur le rôle que doivent tenir les femmes dans cette société : couture, entretien ou encore repassage.
Tout a commencé lors de la sortie en cours ; des détenues ont décroché le filet de volley pour en faire un hamac, ce qui a a provoqué une première altercation avec les matonnes. Plus tard, une détenue refuse de restituer son plateau et se voit brutaliser pour être emmenée au mitard ; frappée puis transférée de force, ses hurlements se font entendre dans l’ensemble du quartier, ce qui ne manque pas d’interpeller ses codétenues. Ne comprenant pas trop ce qui se passe, et prises de panique et de solidarité, elles commencent par taper aux barreaux avec leur plateau puis certaines jettent leur matelas par la fenêtre et y mettent le feu. À partir de ce moment, ce fut l’intervention des super matons (les ERIS) et leur réputation légendaire. Les tensions sont retombées après une intervention musclée qui a choqué les détenues vu les faits en question.
À la suite, quatre détenues ont été présentée au parquet pour une comparution immédiate. L’une d’entre elles l’a refusé. Lors de l’audience, les détenues ont pu exprimé les causes de ces tensions, et malgré l’adhésion du procureur sur la légitimité de leur revendication, celui-ci a quand même estimé qu’elles devaient passer par des voies légales. Cela dénote une bonne connaissance des prisons ; quelles sont ces fameuses voies légales en prison, sachant que juste le courrier arrive avec un mois de retard, et quand on connaît le pouvoir attribué aux matons ?
Résultat : trois mois ferme pour deux d’entres elles, la relaxe pour la troisième et transfert disciplinaire à la MAF de Chalon sur Saone pour les quatre mises en cause. Punition sur punition, en démocratie, comment peuvent-elles encore construire leur défense à Chalon, sachant que les avocats ne vont pas s’y déplacer ? Et que l’une d’entres elles est en préventive et attend encore son procès ? Où est ce fameux droit de la défense ?


P.-S.

Alors que les actes de révoltes individuels ou collectifs en prison sont quotidiens, ils passent rarement au-delà des murs. Il est pourtant essentiel que l’information circule, pour que l’offensive prenne de la consistance, et que la solidarité s’exprime, même à distance. Quelques outils existent pour relayer la résistance au monde carcéral, comme le journal l’Envolée ou l’émission « sur les toits », un dimanche sur deux à 18 h sur radio campus, 92.2 FM.


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