Nathalie Koenders pédale dans le mauvais sens de l’histoire



Koenders, à rebours du monde qui crame mais pile dans la vague de droitisation de la société.

Le 1er juin dernier, dans un article de France bleu [1], on pouvait lire : « À partir de ce lundi 2 juin, tout ce qui roule sera interdit de 11h30 à 20 heures rue de la Liberté à Dijon. C’est une petite révolution pour le plus grand axe piéton du centre ville. »

En 2025, pour les journalistes de France-bleu, peu attaché·es au sens des mot, et pour Nathalie Koenders, la révolution consiste à mettre des bâtons dans les roues des cyclistes, qui ne sont déjà pas particulièrement choyé·es à Dijon. Quiconque a déjà fait du vélo dans cette ville s’est déjà retrouvé·e projeté·e dans la circulation d’une route en sortant d’une piste cyclable qui n’a pas été pensée jusqu’au bout, ou sur des trottoirs dans des rues où il est impossible de se frayer un chemin en vélo avec des voitures qui arrivent à contresens et ne sont pas prêtes à laisser les deux roues se faire une place dans cette métropole. Quand on fait du vélo à Dijon, on est pas particulièrement envahi par une sensation de « mobilité douce ».

Mais visiblement, les personnes qui pensent les arrêtés de cette ville ont d’autres priorités pour les cyclistes : sans un mot pour les problèmes que rencontrent les vélos à Dijon, Koenders coupe la ville en deux et demande de « mettre pied à terre » aux cycliste dans une artère structurante que l’on traverse quasi systématiquement pour aller du nord au sud. Sans proposer de trajet alternatif avec des pistes cyclables qui permettraient de contourner l’ultra-centre sans risquer de se faire renverser 12 fois, Koenders choisit visiblement de pointer les vélos comme un problème, au moment où les agressions contre les cyclistes se multiplient. Se protéger des cyclistes plutôt que les protéger.

Les raisons de cette interdiction sont plutôt obscures, les associations n’ont eu aucun échange avec l’équipe de la mairie, mais Dominique Martin-Gendre, élue à la ville de Dijon en charge de l’espace public, tentera de justifier la mesure sur le plateau de France bleu (encore elleux !).
Elle joue d’abord sur les mots : les vélos ne sont pas « interdits » mais il ne faut pas les utiliser ! Puis lorsque le journaliste essaye de comprendre ce qui a rendu cette mesure urgente, Dominique s’enfonce… Elle évoque de nombreuses plaintes, mais lorsqu’elle doit en dire le nombre et la teneur, elle répond : « On ne va pas dire des plaintes, mais madame la Maire a reçu pas mal de courriers disant "attention". » Pareil ensuite quand il s’agit de dire s’il y a déjà eu des blessé·es : « Des blessés, je n’irai pas jusque-là, mais il y a eu des petits incidents. » Puis elle évoque des conflits qui n’existent pas, mais qu’il faut apaiser : « Il n’y a pas vraiment de conflit, les gens ne se disputent pas dans la rue, mais on veut apaiser. »

À la lecture de cet entretien [2], on peut vraiment se demander ce qui a motivé cette mesure, qui risque de créer plus de remous que d’apaisement. Dans cette rue, il y a bien sur toutes les grandes enseignes que le capitalisme exige dans un ultra centre digne de ce nom. Mais il y a aussi la présence d’un lieu de rassemblement pour les livreuses et livreurs en vélos, des distributions de nourriture pour les gens en galére...

Quand les seules motivations pour interdire les vélos sont des conflits imaginaires et des blessé·es qui n’existent pas, on cherche alors ce qui dans cette rue pourrait déranger... Il convient sûrement à la mairie de cacher celles et ceux qui livrent les repas à celles et ceux qui font leur shopping rue de la liberté. Flâner tranquille puis rentrer et se faire livrer son bobun healthy sans que jamais les mondes ne se croisent. L’envers du décor est peut-être trop visible pour la bande à Koenders.

Mi-février, la mairie avait déjà pris un arrêté crucial pour la qualité de vie des bourgeois·es : interdire les stationnement de livreurs et livreuses à vélo dans le centre-ville [3] parce qu’iels feraient trop de bruit. L’arrêté dénonce en effet des « éclats de voix » qui gêneraient les habitant·es de l’ultra-centre. Ce serait bien que les personnes qu’on fait pédaler dans le froid pour 9,23 euros de l’heure [4] ne s’amusent pas trop en attendant leur prochaine mission... Alors que les conditions de travail des livreurs et livreuses sont catastrophiques et ne font qu’empirer [5], Koenders ne trouve rien de mieux que leur pourrir un peu la vie en les empêchant d’attendre leur prochaine mission au centre-ville, dans les rues qui semblent les mieux situées pour répondre aux différentes demandes.

Depuis des années, la mairie se flatte d’être en train de faire de la rue de la liberté « le plus grand centre-ville à ciel ouvert » de la ville [6], et a enchaîné les décisions pour réprimer celles et ceux qui y font autre chose que du commerce. Il y a dix ans, c’était les zonard·es qui étaient ciblé·es par une suite d’arrêtés et un harcèlement policier [7]. Aujourd’hui, la suppression des vélos semble être la nouvelle étape vers une commercialisation totale de la rue.

Citadin·es qui préfèrent abandonner la voiture ou livreurs/livreuses exploité·es, quelles que soient les réelles cibles de cet arrêté anachronique, il semble contre-productif a bien des égards : les amendes distribuées sur la rue de la liberté ne vont pas créer un eden de paix, mais risquent bien de générer quelques tensions. Les cyclistes vont devoir contourner l’hyper centre en jonglant avec des pistes cyclables peu connectées entre elles.

En 2025 le message est catastrophique et relaie les discours des meilleurs droitards sur les vélos-qui-sont-le-problème. Koenders, à rebours du monde qui crame mais pile dans la vague de droitisation de la société.



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