Dijoncter est accueilli sur les ondes de radio campus tous les mardis matins.
Toutes les chroniques audio sont à retrouver dans la rubrique « Sur l’onde ».

Chronique pour Radio Campus Dijon
Pour aller plus loin :
Texte de la Chronique
— Tiens c’est plus le même tapis sonore ?
— Eh oui, cette semaine c’est un peu particulier, on a troqué Fantomas pour de la musique guinéenne.
— Cool ! Mais, pourquoi ?
— On fête la régularisation de Laye Fodé Traoré et le délai accordé à Ibrahim Barry.
— Ah bon, et c’est qui ces deux là ?
— Eh bien, Laye Fodé Traoré, c’est le jeune apprenti boulanger de Besançon qui était menacé d’expulsion...
— Ah oui ! Celui dont le patron a fait la grève de la faim et qui a fait la Une des journaux et tout !
— Oui, c’est ça...
— Pourquoi il était menacé d’expulsion au fait ?
— Eh bien parce qu’il allait devenir majeur...
— Ah... parce que c’est illégal de devenir majeur ?
— Apparemment, quand tu es guinéen et que tu vis en France, oui...
— What the fuck ?!
— Je t’explique : quand tu es un mineur étranger et que tu arrives seul en France, tu dois être pris en charge par les services de la protection de l’enfance...
— Et ça c’est une bonne nouvelle ?
— Je ne sais pas, en tout cas, jusqu’à tes 18 ans, en gros, tu n’es pas soumis au droit des étrangers...
— Sauf que les autorités administratives font tout ce qu’elles peuvent pour prouver que tu mens et te faire dire qu’en fait tu as plus de 18 ans...
— Effectivement, c’est un premier problème. Il paraît que le nombre de mineurs non accompagnés qui arrivent en France augmentent depuis plusieurs années, il aurait même triplé entre 2014 et 2017.
— Du coup je suppose qu’ils sont de moins en moins bien traités vu que ce sont les départements qui en ont la charge et qu’ils se plaignent de ne pas avoir assez de moyens pour eux...
— On peut le craindre, oui. En tout cas, il paraît que l’État ne file pas plus de 1200 balles, soit à peine de quoi assurer les frais des 5 premiers jours de séjour d’un jeune ou d’un enfant isolé...
— Heureusement qu’il y a les assos et les réseaux de solidarité autonomes. Et si tu t’en sors jusqu’à tes 18 ans, qu’est-ce qui se passe ?
— Soit t’es chanceux et t’es déjà dans une procédure qui va te permettre d’obtenir l’asile, soit les ennuis commencent...
— Genre ?
— Par exemple quand t’es guinéen, t’es grave dans la merde...
— Ah bon ?
— Ouais, selon l’association Solmiré de Besançon, une directive absurdissime traîne depuis 2017. Elle enjoint la police aux frontières à « formuler un avis défavorable pour toute analyse d’acte de naissance guinéen ».
— What the fuck ?!
— En effet, c’est hallucinant. En gros, si t’es guinéen, la police considère d’office que tes papiers sont faux. Du coup, tu peux dire adieu à ton titre de séjour.
— Non mais j’y crois pas !
— Tu peux aller vérifier sur le site de SolMiRé si tu veux. Mais attends, accroche toi, parce que l’absurdité s’arrête pas là.
— Merde...
— Le préfet peut justifier de te coller une obligation de quitter le territoire français sur la base d’un autre motif.
— Lequel ?
— Le manque de preuve d’une absence de lien avec ta famille d’origine...
— Quoi ?! En gros, tu dois prouver que t’as plus de lien avec ta famille ?
— C’est ça...
— Mais c’est débile ! Si justement t’as plus de lien, t’as aucun moyen de le montrer !
— Complètement, c’est ce que dénonce aussi l’association SolMiRé. Ils alertent depuis cet été sur la situation de ces nombreux jeunes guinéens qui sont soumis à cette directive absurde de la PAF qui leur empêche systématiquement d’avoir des papiers.
En plus de ça, au début de l’hiver, l’asso a demandé à ce que l’Unesco retire le qualificatif « ville amie des enfants » à Besançon.
— J’ose pas imaginer pourquoi...
— L’association avait été avertie de la situation d’un adolescent étranger, « mis à la rue par le Département qui remettait en cause sa minorité. »
— Tu vois, c’est ce que je disais.
— Oui, et malgré le confinement, la crise sanitaire et l’approche de l’hiver, aucune solution d’hébergement ne lui a été proposée.
— Les bâtards ! Mais en fait, tout ça c’est parfaitement délibéré, l’État cherche à décourager les jeunes migrants de venir en France...
— On dirait bien, c’est ce que dit l’association SolMiré en tout cas.
— Bon, mais là, c’est la sale ambiance du coup. Je croyais qu’on faisait la fête.
— T’as raison, il faut quand même dire que la lutte a l’air de commencer à payer pour ces jeunes guinéens. En une semaine Laye Fodé Traoré a été régularisé par la préfecture du Doubs, et Ibrahim Barry, lui aussi guinéen et apprenti boulanger a obtenu un délai de 6 mois auprès de la préfecture de Côte d’or pour terminer sa formation.
— Ça fait plaisir, mais il va falloir continuer à se battre, en plus il y a plein d’autres cas.
— Oui, la semaine dernière il y a d’ailleurs encore un autre guinéen, Yaya Camara, apprenti électricien qui a manifesté seul devant le Tribunal Administratif de Besançon pour demander que son OQTF soit levé afin qu’il puisse reprendre son apprentissage.
— Ok, on lui souhaite bon courage, et comment on peut les soutenir de notre côté ?
— Bon, il y a une pétition en ligne pour Yaya Camara et Stéphane Ravacley, le boulanger qui s’était mis en grève de la faim, a créé une page facebook pour fédérer toutes les situations du même genre…Mais, la base, c’est que tu peux te rapprocher des associations d’aide aux migrants qui sont dans ta ville. Et puis on se tiendra au courant de toute forme de mobilisation dans les jours à venir.
— Ça marche, alors à la semaine prochaine !
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