[Besançon] Relaxe pour le journaliste accusé de diffamation contre un ex-bacqueux


Doubs

"Répondant ce jour du délit de « diffamation », le tribunal correctionnel de #Besançon vient de me relaxer."

Jérôme Casas, responsable de la discothèque le QG, ancien cadre de la BAC, entendait me faire condamner, suite à un article publié le 28 juillet 2022. J’évoquais ce qui allait devenir l’affaire Seïf Boulazreg : un citoyen de vingt-cinq ans, éconduit de cette boîte de nuit, pourchassé par le patron, était mort dans des circonstances troubles et contestées. Le président dresse un petit panorama, puis lit les passages dénoncés comme litigieux. Après avoir relevé l’usage du droit au silence au commissariat, il pose plusieurs interrogations.

« Qu’est-ce qui vous permet d’être affirmatif à propos de Monsieur Jérôme Casas, malgré ses états de service et ses décorations... sur la traque organisée visant Seïf Boulazreg, ce passif policier présenté comme violent, son rejet présumé de la Gare-d’Eau ? » « Je me base principalement sur des témoignages, multiples et précis. Au moins onze ont été versés, de mémoire. On a par exemple le cas d’un jeune homme, qui avait déposé plainte notamment contre lui pour des brutalités et menaces commises le 18 juin 2015. »

Le débat se focalise alors sur les modalités de départ du fonctionnaire, plutôt décrites comme une « éviction. » Un mot fort, mais assumé : « Le fait de poser une démission, ça ne retire rien des conditions dans lesquelles cette sortie s’est en réalité opérée… en l’occurrence, j’ai aussi noté l’absence apparente de sanctions pénales ou administratives. Toutefois des incidents lourds et répétés avaient été remontés à la hiérarchie dont au DDSP de l’époque, c’est notoire et parfaitement documenté par mes soins. »

Au milieu de la quarantaine de pièces et attestations produites, d’un coup les regards se figent. « Je vois qu’il y a un extrait de casier B1, c’est assez incroyable ! comment l’avez vous recueilli, même pour un magistrat ce n’est pas si simple » s’étonne le président. « On trouve également des dépositions de mon client » insiste la partie civile, qui espère des explications sur ces obtentions. « Par qui, comment, pourquoi ces documents m’ont été transmis, cela ne vous regarde pas, c’est le secret des sources » vais-je opposer.

Reste une question, est-ce que des éléments à décharge ont été trouvés durant mon enquête ? « Sur la trentaine d’entretiens réalisés, seules deux personnes ont admis qu’un contrôle ne s’était pas trop mal passé. Pour les autres, ce fut une suite de récits accablants. » Maître Ornella Spatafora tente pourtant de brosser un portrait élogieux de l’ex-brigadier, qui n’a pas fait le déplacement. Dans un contexte de tensions suscitées par cette actualité tragique, celle-ci évoque une atteinte à l’image et un préjudice moral évalués à 2 000€.

De son côté la Procureure liste les faiblesses du dossier, avec une mise en accusation visant le simple rédacteur en lieu et place du rédacteur en chef... et surtout sur le fond, sa conviction que la bonne foi est constituée. « En conséquence, le ministère public demande la relaxe. » Pour les intérêts de la défense, maître Fabien Stucklé abonde longuement en ce sens. Il évoque « sa consternation qu’un tel dossier ait été traité et soutenu par le Parquet, situation qui l’inquiète gravement quant à la liberté de la presse et la pluralité de l’expression. »

Alors que la décision avait été initialement annoncée comme allant être mise en délibéré, celle-ci est finalement rendue sur le siège. Après quelques minutes d’interruption de séance, les magistrat.e.s exposent et motivent leur jugement : la relaxe est prononcée ! Si les intéressé.e.s ne se risquent pas à admettre l’exception de vérité, le caractère invalide de la procédure ainsi que la confirmation du principe de bonne foi sont quant à eux pleinement retenus. Pour les voix alternatives et indépendantes, c’est une belle victoire.

L’occasion de remercier toutes celles et ceux qui m’ont soutenu, durant l’audience et en-dehors : habitant.e.s de Besançon, élu.e.s et associations, militant.e.s politiques et syndicaux, consœurs et confrères, et bien sur Radio Bip 96.9FM/Média 25 ainsi que le Snj-cgt. Sans oublier de saluer la famille de Seïf Boulazreg, mobilisée à mes cotés face à cette offensive. Depuis maintenant neuf mois, celle-ci exige que vérité et justice passent enfin… un combat plus que jamais légitime, que nous continuerons évidemment de porter.

Toufik de Planoise



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