« Les sauvages des Lentillères » - Recueil de mauvaises herbes


Quartier Libre des Lentillères

Marquant les 10 ans d’occupation du Quartier libre des Lentillères, un recueil recense les plantes sauvages que l’on peut y trouver (comme dans bien d’autres endroits) et qui permettent de se soigner ou de se nourrir sans avoir besoin de les cultiver, ainsi que les différentes manières de les utiliser ou de les transformer.

« Les sauvages des Lentillères » est un recueil d’une centaine de page, qui répertorie les plantes sauvages les plus fréquentes sur le Quartier des Lentillères et donne quelques pistes pour savoir comment les utiliser. Ces plantes sont très simples, et on les trouve dans bien d’autres endroits qu’aux Lentillères : pissenlit, ronce, chiendent, églantier, mauve, millepertuis, ortie, rumex,...
Ce livre a été réfléchi, écrit, mis en page, et sérigraphié par des personnes impliquées dans la vie et la lutte des Lentillères. Il est pensé comme un outil pour apprendre à prendre soin de ce territoire et à en faire éclore les richesses en cas de besoin.

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Sommaire

Le livre est introduit par un bref résumé de ce qu’est le Quartier des Lentillères, et par une préface qui revient sur l’histoire de la destruction des connaissances populaires liées aux plantes (à lire plus bas). Ensuite, on y trouve les croquis et descriptions d’une trentaine de plantes, avec leurs propriétés médicinales, et quelques idées pour les transformer.
On trouve également des recettes pour aider à la préparation d’huiles, de baumes ou encore de distillation.

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Comment le trouver ?

Depuis un mois, le livre est disponible tous les jeudis sur le marché des Lentillères, mais aussi à la librairie « La fleur qui pousse à l’intérieur » (5 place des Cordeliers à Dijon).
Les bénéfices de la vente sont intégralement destinés à la Rebouterie, la salle de soins autogérée du Quartier des Lentillères.

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Préface

Aussi loin que remonte la mémoire humaine, on trouve des fragments de savoir médicinal lié à l’utilisation de ce qu’offre la terre. Depuis très longtemps, les êtres humains connaissent les plantes assez intimement pour se servir de leurs propriétés, tellement précisément qu’ils savent comment et dans quelle quantité les assembler pour produire telle ou telle réaction. Il existe depuis toujours une connaissance qui permet l’utilisation des plantes comme remède, poison, hallucinogène,... Il y a 60 000 ans, l’homme de Néandertal utilisait déjà la centaurée ou la rose trémière dans des préparations médicinales. Il reste de nombreuses traces écrites de connaissances antiques liées à l’utilisation des plantes à travers le monde, comme le recueil chinois Pen Tsao (- 2800), le papyrus d’Eber en Égypte (- 1500) ou les ouvrages d’Hippocrate (- 500). Ce savoir immémorial est arrivé par bribes jusqu’à nous, transmis oralement de générations en générations, parfois compilé dans des ouvrages écrits. On en trouve des traces au sein de toutes les cultures ou civilisations, partout dans le monde.

Les connaissances des plantes se transmettent de l’antiquité au Moyen Âge de manière orale à travers les traditions et coutumes populaires, les temples, monastères et abbayes. Puis le rayonnement des écoles abbatiales et cathédrales décline au profit des universités naissantes comme à Salerne et Montpellier où sont formés les premiers apothicaires. Ils sont les héritiers de ces connaissances mais commencent à en détourner l’usage.
C’est le début de l’époque moderne, la Science commence à s’émanciper de l’éthique religieuse en tant que discipline propre. On commence à ériger la Raison en dogme et le monde masculin, où tout est calcul, quantité, dissection et rationalisation étend son hégémonie. On pourchasse et condamne tous ceux et celles qui utilisent ce qu’on nomme la magie, discipline dans laquelle on fait rentrer, entre autres, toutes les connaissances liées aux plantes qu’on ne contrôle pas. En réalité, on pille un savoir, on l’institutionnalise et on élimine tous ceux et celles qui refusent de se soumettre à ce vol ou qui persistent à pratiquer leur art en dehors des académies. Et dans ce combat, on vise particulièrement les femmes, par peur de la puissance qu’elles peuvent déployer et qu’on ne comprend pas. Elles sont persécutées sans relâche du XIIIe au XVIIe siècle. Les femmes considérées comme sorcières sont des femmes qui ont les capacités de se soustraire au monde masculin qui est en train de s’imposer. Soit domestiquement, en ayant les connaissances nécessaires pour se protéger des violences conjugales à l’aide de plantes qui rendent impuissant, indolent, ou qui entament la volonté. Soit socialement, en s’isolant ou en vivant entre femmes, et par ce fait même, elles sont à la fois les ostracisées des villages ou des cités et à la fois celles qui dispensent la médecine à la communauté qui la considère avec plus ou moins de méfiance. C’est un monde de femmes, qui n’ont pas besoin d’hommes pour accoucher, se soigner ou se protéger qui est attaqué.
Au XIIIe siècle, Heinrich Kramer et Jacques Sprenger publièrent le Malleus Maleficarum (Le Marteau des sorcières), mettant en garde contre la sorcellerie en fournissant des directives pour repérer et éliminer les sorcières. Le Malleus dit : « Une femme qui pense seule pense à mal ».

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Une fois la chasse aux sorcières passée, c’est à dire une fois que la Science des hommes a réussi à s’imposer assez confortablement dans les esprits, on assiste au triomphe de la science positiviste qui voit naître la Chimie moderne. On peut désormais isoler les substances actives des plantes, puis dès le début du XXe, synthétiser les molécules thérapeutiques.
La plante n’est plus un être en tant que tel, qu’il faut cueillir à un moment précis, d’une certaine façon, et qui va servir à la lente et codifiée élaboration d’un remède. Désormais on produit industriellement des ersatz de molécules isolées de la plante. Il ne manquait plus que le régime de Vichy pour supprimer le diplôme d’herboriste. On interdit à quiconque de donner, vendre et conseiller des plantes, hormis aux pharmaciens. À partir des années 60 on va même, grâce à la découverte du génome, produire des OGM qui vont développer des molécules impossibles à isoler ou synthétiser. Aujourd’hui on brevette à tour de bras, c’est-à-dire on s’approprie la plante, sa culture, son utilisation. Par ce fait, on prive tout le monde de ces richesses, y compris et surtout ceux et celles qui nous ont permis de les découvrir. On établit une liste restreinte de plantes autorisées à être utilisées comme remède et on condamne ceux et celles qui osent cueillir les bannies pourtant si utiles, devenues monopole pharmaceutique.
La plus grande partie de notre pharmacie moderne provient du pillage des anciennes connaissances, transmises oralement depuis des millénaires. On a transformé le rapport ancestral à la plante et on sépare toujours plus la partie du tout, la molécule de la plante, le remède de l’homme, la maladie du corps,… Dépossédé de tout savoir véritable, de toute expérience personnelle, soumis au règne des experts, notre rapport aux maux est dégénéré. On avale des molécules synthétisées sur les conseils de médecins à la solde de ceux qui les produisent en n’ayant aucune idée de ce que l’on ingurgite et de l’effet que cela aura sur nous. Les scandales sanitaires nous rappellent ponctuellement que c’est le fonctionnement intrinsèque de la médecine moderne qui est scandaleux. La médecine n’est plus une manière de soigner, c’est une forme de gestion de la population. Les conflits d’intérêt entre laboratoires pharmaceutiques, chercheurs, experts médicaux, pharmaciens et médecins en deviennent le maillage intimement putride.

La maladie n’est plus considérée que comme un symptôme isolé de son environnement, un terme classifié dans un manuel qui répertorie, change de case, invente des nouvelles maladies. Tout devient pathologique. La gestion de la vie et de la mort devient l’un des plus importants filets tendus sur les tentatives d’autonomie et de réappropriation des savoirs, nous qui avons abandonné aux spécialistes tout savoir sur notre corps, nos maladies, les remèdes qui peuvent les guérir. Ces spécialistes qui font de la dépression un moyen d’écouler des substances aliénantes et addictives, et de la grossesse une pathologie à surmédicaliser ; du traitement contre le sida une affaire juteuse et des divers scandales médicamenteux une petite erreur de parcours.
Sans pour autant renier l’importance de certains traitements allopathique, la réappropriation et la transmission des savoirs populaires deviennent nécessaires lorsqu’on cherche à s’extraire du carcan médical institutionnel.
Prenant acte de cet état de fait, nous nous mettons en chemin à la recherche d’une médecine qui nous ramène les pieds sur terre, qui met en jeu notre rapport à la maladie et au monde. Puisque c’est bien ce monde qui produit ce qui nous soigne et ce qui nous rend malade. Nous partons à la découverte d’une manière de se soigner qui nous permette d’utiliser ce qui est là, à la disposition de tous, gratuit et abondant.
Dans ce bref ouvrage, nous ne parlerons pas de toutes les redécouvertes liées au monde des plantes. Nous ne parlerons pas des protéodies de Joël Sternheimer et de l’influence de la musique sur le développement des plantes ; ou de la manière dont, lorsqu’ils cultivent, les peuples qui sont encore en lien avec leur territoire chantent des chansons qui permettent aux plantes de s’épanouir. Nous ne parlerons pas des systèmes de défense et de communication électrique et chimique des plantes dont les mécanismes étaient connus bien avant la Science moderne. Nous n’aborderons pas l’importance des influences astrales sur les cycles vitaux des végétaux. Nous partirons d’où nous sommes. Nous nous concentrerons sur la découverte des plantes qui sont autour de nous et la manière dont nous pouvons les utiliser. Les « simples » comme les nommaient les anciens et les anciennes, c’est-à-dire la connaissance élémentaire de ce qui est déjà là. L’endroit d’où nous partons n’est pas un endroit neutre, il s’agit d’un lieu qui se veut déjà antagoniste à la logique industrielle, marchande et froide qui domine aujourd’hui. Nous parlons depuis le Quartier des Lentillères, lieu de vie, de lutte, de fête, de maraîchage et d’expérimentations potagères. Nous proposerons ici un inventaire d’une vingtaine de plantes qui permettent de se soigner ou de se nourrir, que l’on peut trouver ici et ailleurs, sans avoir besoin de les cultiver, ainsi que les différentes manières de les utiliser et de les transformer. Ceci afin d’offrir la possibilité à tous ceux et celles qui le souhaitent de connaître un peu plus intimement leur territoire, de prendre soin de ce qui y vit et de savoir comment en tirer les richesses en cas de besoin. »

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