Récit du blocage du salon de l’industrie sylvicole Euroforest


Saône-et-Loire

Le 23 juin 2023 se tenait le salon Euroforest, grande foire de l’extractivisme forestier et du technosolutionisme. Une cinquantaine de personnes revendiquant des forêts vivantes ont bloqué l’accès au salon.

Nous étions présent ce 23 juin à Saint-Bonnet-de-Joux pour un blocage non violent de l’accès à Euroforest.

Parce qu’en matière de vivant, les réalités scientifiques ne peuvent pas se soumettre à des postures idéologiques.

Parce que les faits montrent que les engagements environnementaux ne sont pas tenus.

Parce que la forêt ne pourra pas s’adapter à + 4° C même si Macron lui demande fermement avec l’appui des forces de l’ordre.

Il faut désarmer la machine.

Avec ses discours simplistes, la filière se conduit encore en industrie extractiviste. Le dernier rapport de l’Académie des Sciences Les forêts françaises face au changement climatique ainsi que le Mémento 2022 de l’Inventaire Forestier National montrent une accélération des coupes de bois.

Qui peut croire que la récolte de grands arbres est neutre puisque l’on en replante des plus jeunes ?

Qui peut croire que le bois se substitue à d’autres matières ou énergies alors que les travaux d’historien tel Jean-Baptiste Fressoz montrent que les consommations de tous les matériaux et toutes les énergies augmentent ?

Qui peut croire que le bilan carbone des produits bois est neutre quand la récolte, le transport, la transformation, la commercialisation, la reconstitution et l’entretien des forêts industrielles, le retraitement de ses mêmes produits, sont toutes des opérations dépendantes des énergies fossiles ?

Qui peut se sentir en sécurité sur des routes et des chemins surplombés d’arbres sec ?

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Tous ces mensonges font que la forêt s’appauvrit en diversité, en structure, en volume de bois. Si la surface a augmenté ces dernières années du fait de la déprise agricole, l’accroissement annuel en volume a chuté de 10% et ce sans tenir compte de la déforestation importée (corollaire de la déprise agricole).

Pour que la France atteigne ses objectifs de stratégie bas carbone les scientifiques appellent à une sylviculture à couvert continu avec des essences diversifiées, les produits bois doivent être durables et la filière doit optimiser son bilan carbone.

Or Euroforest nous propose des machines dont l’efficacité va de pair avec l’uniformisation des forêts et les récoltes totales (coupe rase). Les solutions d’adaptation proposées passent par des broyages de rémanent, du travail du sol, de la plantation, et de l’entretien. La production est orientée vers des produits transformés, jetables, et du bois énergie.

Bien sûr toute cette belle machinerie fonctionne à l’énergie cosmique captée par notre leader charismatique, mais surtout avec celle fournie par son ami Mohammed Ben Salman.

Ne laissons pas la Forêt en pâture au mythe de la croissance. Réinventons notre rapport au vivant en prélevant du bois sans détruire l’écosystème avec des méthodes douces et faiblement impactantes.

Utilisons le bois au plus proche de ce qu’il est en développant les savoir-faire et les filières de proximité. Interrogeons les labels (PEFC [1] FSC) au-delà de leur titre autoproclamé de durable.

Mais dans l’urgence désarmons les industries et les pratiques écocidaires.

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Euroforest, photographie instantanée de la filière, la forêt est dans le titre mais sur le terrain on ne voit que des machines. Les associations environnementales ont des stands minuscules sur des allées secondaires et même les officiels qui s’expriment sur écran géant sont dans le dos des visiteurs qui entrent sur le salon.

On n’est pas là pour discuter, on est là pour couper, tirer, arracher, broyer, retourner, transporter, exporter… Financer, replanter, compenser.

Ces aptitudes se sont traduites en acte puisque la stratégie des forces de l’ordre a été dans un premier temps de laisser aux visiteurs et exposants du Salon le « soin » d’ouvrir eux même l’accès au Salon que nous avions décidé de bloquer.

Les insultes traditionnelles consistant a priori à considérer les opposant.es comme des faignants.tes des assisté.es se sont enrichies d’insultes misogynes, ces messieurs n’ayant vraisemblablement pas l’habitude que des femmes puissent leur tenir tête et avoir un point de vue sur la forêt.

La nouveauté historique d’Euroforest 2023 : durant toute une matinée une opposition forte et populaire a bloqué l’accès à un salon d’industrialisation du vivant. Dommage que les politiques et officiels aient préféré au débat les autocongratulations feutrées laissant leur gros bras animer le débat démocratique.

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Notes

[1Créé en 1999 par l’industrie du bois, le label PEFC est aujourd’hui présent sur de nombreux produits de consommation courante : magazines, meubles en bois, emballages papier ou encore papier hygiénique. Alors qu’il est censé « promouvoir une gestion durable des forêts », il permet d’ « éco-certifier » des pratiques peu scrupuleuses en matière d’environnement. Pour plus d’informations, voir le documentaire PEFC. Le Label qui cache la forêt...

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