À l’angle des rues d’Assas et Jean-Jacques Rousseau, la quatrième fresque du M.U.R.(Modulable. Urbain. Réactif.) a été inaugurée vendredi dernier. Elle se nomme Honneur et a été réalisée par le graffeur Bom-K (Bombing Killa), ancien membre de DMV (Da Mental Vaporz) créé en 1999 avec Iso et Kan. La fresque représente une Marianne au visage grave, les traits tendus, le regard emprunt de tristesse mais déterminé. On sent en elle une montée de colère, l’arrière de sa chevelure semblant se disloquer tel une Super Saiyan aux prémices de sa mutation. Et en guise de Kamé Ha, un cocktail Molotov qu’elle serre contre elle, le regard fixé sur les portes de la Préfecture. Il y a quelque chose de maternel dans ce geste, Marianne est telle une louve, prête à protéger ses enfants.
Après plus de quatre mois d’assauts hebdomadaires de la Préfecture et une récente attaque au cocktail Molotov, cette image interpelle et fait réagir les réactionnaires, c’est leur rôle !
Ainsi s’émeuvent Emmanuel Bichot :
« La municipalité vient de sponsoriser et d’inaugurer une fresque représentant une Marianne un cocktail Molotov à la main. Elle est située à proximité de la préfecture, qui vient de recevoir des cocktails Molotov ! Sans discuter l’intérêt artistique, est-ce judicieux dans le contexte actuel de violences urbaines répétitives au centre-ville de Dijon ? »
ou Valérie Grandet :
« Une nouvelle fresque Marianne symbole de la République tient un cocktail Molotov payée avec l’argent public alors que les policiers et la Préfecture à deux pas, sont depuis 4 mois soumis aux cocktails Molotov d’arnachistes. Ça ne choque personne à la Ville de Dijon et à la Préfecture de Police ? »
(On se demandera au passage ce que sont des arnachistes ?)
Christine Martin, adjointe au maire en charge de la culture répond :
« Chacun peut y voir ce qu’il souhaite y voir. Pour certains, cette bouteille contient un message que la Marianne s’apprête à jeter à la mer. Cette œuvre, baptisée « Honneur », fait honneur aux valeurs de la République. L’art est tout sauf tranquille. »
Bom-K, lui, assume :
« Marianne tient entre ses mains un cocktail Molotov, version réactualisée du fusil adaptée à notre période actuelle. Cette œuvre décrit ainsi l’insurrection actuelle. La Marianne est ici observatrice et dans l’attente. Prête à agir, prête à s’insurger. Elle est aussi là pour fédérer et refuser toute injustice. C’est la Marianne de tous les Français. »
Marien Lovichi soutient la décision de la municipalité :
« Nouvelle fresque pour 3 mois, l’art ne se discute pas, j’apprécie beaucoup le cocktail Molotov dans les mains de Marianne exemple d’un peuple qui veut reprendre sa liberté, presque du Banksy, Bravo !! »
Ce choix est pleinement assumé par Nathalie Koenders et Christine Martin, qui représentent la municipalité de Dijon lors de l’inauguration de l’œuvre vendredi dernier.
Nathalie Koenders twitte :
Vernissage d’une nouvelle œuvre sur le M.U.R. de la rue Jean-Jacques Rousseau. Bravo à Bom.K pour son travail et merci à l’association @ZUTIQUEdijon pour son engagement en faveur de la promotion de la #CultureUrbaine à #Dijon pic.twitter.com/AkY3JUryQi
— Nathalie KOENDERS (@nkoenders) April 12, 2019
Première adjointe au maire, symbole de la femme moderne entreprenante, ex-championne de France de canoë-kayak, cadre au Creps, conseillère départementale, membre du conseil national du PS et mère de deux enfants, Nathalie Koenders est engagée sur de multiples fronts. Elle s’est fait remarquer il y a peu pour son combat contre les violences faites aux femmes, le sexisme ordinaire dans tous les milieux qu’elle a traversé (sportif, politique, …), le fait que la société actuelle ait été bâtie par des hommes pour des hommes et qu’il était temps de renverser la vapeur. C’est également elle qui avait accueilli et écouté le 26 novembre dernier un groupe de Gilets Jaunes venus interpeller les élus locaux à l’occasion du Conseil municipal. Elle leur avait assuré que les taux des impôts locaux et les tarifs des transports en commun locaux ne serait pas augmentés en 2019 et que le prix de l’eau allait baisser cette année.
Lors de l’inauguration de la fresque, elle nous offre un discours sans ambiguité :
« Un grand bravo à l’artiste. Je crois que ça fait l’unanimité, pour avoir discuté avec les commerçants, avec les habitants et avec les passants. C’est vraiment une très belle œuvre qui va contribuer à l’attractivité du quartier. Christine Martin m’a envoyé la photo cet après-midi avec quelques craintes en sachant que je venais. Je ne sais pas si c’est parce que je suis première adjointe, en charge de la tranquillité publique. Mais c’est bien une Marianne qui tient un cocktail Molotov en direction de la Préfecture… En tous cas, sachez qu’à Dijon, on défend la culture, on défend la liberté, la liberté d’expression, et c’est une belle incarnation des valeurs de la République et de Marianne. »
Christine Martin déclare ce choix comme « absolument judicieux » et enchaîne :
« J’aime cette Marianne, j’aime la femme libre qu’elle représente et les valeurs qu’elle défend. J’aime son regard déterminé, et j’aime cette démocratie et cette liberté d’expression. Ici, on défend les artistes et leur liberté et on est fiers de ce qu’on fait dans notre ville. »
La représentante des commerces de la rue Jean-Jacques Rousseau remercie la Ville de Dijon pour avoir choisi le quartier : « Ce mur est un véritable coup de projecteur et de fraîcheur, la première fête à Rousseau ouverte. »
Ainsi la municipalité et les commerçants sont unanimes : il faut s’en prendre à la Préfecture, et nous sommes solidaires de celles et ceux qui osent faire le pas ! Ce geste de soutien alors qu’en ce moment certains sont justement inculpés pour cette raison réjouit les cœurs et redonne de la force à ceux et celles qui s’acharnent tous les samedis à passer les barrières qui protègent la Préf !
Nous attendons donc les élus et les commerçants le 19 juin devant le tribunal pour soutenir les trois compères du Boeuf Blanc mis en examen pour dégradation par un moyen dangereux.
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