Le 28 avril, la présidente du centre l’INRAE (Institut National de Recherche pour l’Agriculture, l’Alimentation et l’Environnement) de Bourgogne Franche-Comté envoyait une « Invitation » à ses chercheur.se.s pour une « une visite de sites Alliance BFC destinés à la production d’AgriEnergies (méthanisation, photovoltaisme) » dans le cadre d’un partenariat entre Alliance BFC et l’INRAE. Alliance BFC regroupent trois coopératives agricoles : Coopérative Bourgogne du Sud, Terre Comtoise et Dijon Céréales. Cette dernière est notamment connue pour ses expérimentations de colza OGM dans la région [1]. Il s’agit lors de cette visite de « découvrir ces dispositifs et d’échanger sur les questions scientifiques émergentes ».
Au programme de la visite, un « café et un repas convivial », puis une visite du méga-méthaniseur de Cérilly ainsi que des projets agri-voltaïque de Channay et de Verdonnet.
Ces projets - notamment celui du méga-méthaniseur de Cérilly - ont provoqué de nombreux débats et appels à manifester, que l’invitation précédemment citée prend un grand soin de taire. Plusieurs associations et organisations se sont publiquement opposées à ce projet. La Ligue de Protection des Oiseaux pointe du doigt les CIVEs (Culture Intermédiaires à Vocation Énergétique) dans le déclin de certaine espèces d’oiseaux protégées au niveau national [2]. La confédération Paysanne de Côte d’Or dénonce une agriculture extractiviste menaçant l’autonomie des paysan.ne.s [3]. L’agrivoltaïsme est dénoncé par Jura Nature Environnement, qui pointe le prétexte fallacieux offert par la production d’énergie verte pour augmenter sans cesse l’artificialisation des terres [4].
Un collectif de scientifiques - le Collectif National Vigilance Méthanisation - provenant de différentes disciplines s’est également constitué, montrant que la méthanisation consommerait probablement plus d’énergie qu’elle n’en produirait [5]. Au vu de ce contexte, comment est-ce possible de sceller une alliance avec des industriels de l’agro-alimentaire ? Est-ce bien le rôle d’un institut de recherche public que de visiter béatement ces méga-projets privés ô combien controversés ?
Nous, doctorant.e.s précaires de Dijon, nous nous inquiétons de la collusion des lobbys agro-alimentaires et de la recherche universitaire, dont la visite du méga-méthaniseur de Cérilly est le dernier exemple en date et - malheureusement - seulement un des avatars. Cette collusion non voilée menace un peu plus fortement l’indépendance de la recherche, à peine plus de trois ans après la Loi de Programmation pour la Recherche, qui a déjà accentué notre précarisation et la privatisation de la recherche. La science n’est-elle pas avant tout un espace de débats au sein duquel toutes les opinions devraient pouvoir s’exprimer ? Pourquoi n’avoir pas organisé une journée d’études avec des chercheur.se.s spécialistes du sujet plutôt que d’organiser un « repas convivial » financé par des coopératives agricoles ? Au vu des oppositions à ce projet, des doutes scientifiques sur sa pertinence et plus globalement de la dérive de la recherche publique, nous appelons à manifester le samedi 3 juin à Châtillon-sur-Seine avec les opposant.e.s au projet.
Doctorant-e-s précaires de Dijon
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