Le devoir de réserve et l’obligation de discrétion



Sous forme de jeu, à la fois discret et réservé, viens t’essayer à la bonne conduite du fonctionnaire de l’éducation nationale .

Suite à la polémique récente sur le devoir de réserve dans l’éducation nationale et l’émergence d’un nouveau hashtag protestataire #je suis enseignant.e (après #pas de vagues), il est temps de faire le point sur un « devoir » qui entrave la liberté d’expression du fonctionnaire.

Afin d’être pédagogue et compréhensible, on propose un jeu de questions/réponses. Si vous obtenez plus de 4 bonnes réponses, vous pouvez sans crainte devenir fonctionnaire dans « l’école de la confiance ».

1- Qu’est-ce que l’obligation de discrétion professionnelle ?

Réponse : un fonctionnaire doit non seulement être « réservé » mais il doit aussi être « discret ». Bien entendu, il a aussi obligation d’être « secret ».

2- Si un fonctionnaire est « réservé » mais peu « discret », que risque-t-il ?

Réponse : les sanctions encourues sont les mêmes pour la violation du devoir de réserve ou de l’obligation de discrétion. Le blâme, la mutation forcée, la rétrogradation voire en cas de manquement grave, la révocation.

3- Dans l’éducation nationale, à quel moment considère-t-on qu’un enseignant enfreint ces différents devoirs ?

Réponse : si un enseignant s’exprime en tant que tel et critique l’institution, il est considéré comme fautif et peut donc avoir à répondre de ses actes devant une commission disciplinaire. En tant que simple citoyen, il peut en revanche, prendre la parole à condition cependant de respecter l’obligation de discrétion.

4- Si un enseignant condamne des dysfonctionnements de son ministère de tutelle sans faire mention de sa profession ou de son lieu d’exercice, peut-il tout dire ?

Réponse : en théorie, oui ; en pratique, non. L’obligation de discrétion, ainsi que le devoir de réserve, contraint le fonctionnaire même quand il n’est que simple citoyen. D’après la loi du 13 juillet 1983, l’obligation de discrétion s’exerce sur le lieu de travail et en dehors de celui-ci.

5- Dans ces conditions, quel espace d’expression réel reste-t-il au fonctionnaire ?

Réponse : l’espace d’expression varie en fonction du ministère de tutelle. Le militaire ou le policier se taisent. L’enseignant pas encore car depuis Anicet Le Pors en 1983, le devoir de réserve ou de discrétion est jurisprudentiel et varie en fonction de la lecture que l’on fait des textes.

6- Assiste-on en ce moment à une remise au pas du fonctionnaire de l’éducation nationale ?

Réponse : depuis l’arrivée du nouveau ministre de l’éducation nationale, les convocations d’enseignants dans les rectorats pour manquements au devoir de réserve se multiplient. Les blogs sont scrutés de près, les réseaux sociaux et les webzines sont sous haute surveillance. Si, comme le veut le ministre, l’article 1 du Code de l’éducation, est réformé, l’enseignant verra sa liberté d’expression rognée et même un pseudonyme ne le protégera pas nécessairement des représailles de son administration.

7- Dans ces conditions, peut-on affirmer que le « devoir de réserve » et « l’obligation de discrétion » sont les leviers utilisés pour réduire la liberté d’expression du fonctionnaire de l’éducation nationale ?

Réponse : sans aucun doute, on assiste à une entreprise de sujétion sans précédent de la part de l’actuel gouvernement. Le fonctionnaire tel qu’il est perçu en 2019 n’est pas un citoyen ordinaire. Il doit sans cesse s’autocensurer car la lecture de ses droits est si restrictive qu’il finit par être en faute...sans le savoir. Le devoir de réserve sert la politique menée par l’état. Le fonctionnaire n’est pas censé avoir des cas de conscience !

8- A quel moment de la session parlementaire, le code de l’éducation sera-t-il révisé ?

Réponse : fin janvier, début février. D’ores et déjà le ministère de l’ éducation nationale anticipe la contestation et communique sur le thème « toute cette affaire n’est que pur phantasme ». Sur le terrain, les délégués syndicaux ont chaque jour la preuve du contraire. L’autoritarisme du nouveau ministre, son inflexibilité revendiquée se lit aussi dans sa façon de mener l’actuelle réforme du lycée. Peu ou pas de concertations, des choix économiques plus que pédagogiques et un mépris des personnels qui se traduit par l’annonce massive de suppressions de postes.

Dans ce contexte, la modification des modalités du devoir de réserve relève d’une stratégie assez claire. Etouffer la contestation de la base enseignante et donner au seul chef d’établissement la mission d’expliquer aux familles et aux élèves les réformes en cours. On constate d’ailleurs que les professeurs sont écartés des réunions d’informations sur la future réforme du lycée et ses conséquences inévitables. L’information est verticale, du ministère aux établissements scolaires via les rectorats.

9- Un mot de la fin ?

Réponse : sous forme de conseil aux enseignants, tant qu’il en est encore temps. Organisez-vous pour refuser cette atteinte à votre liberté d’expression et d’opinions. Le devoir de réserve, de discrétion, s’ils sont réformés, feront de vous les soutiers de l’éducation nationale. Le ministère de l’intérieur et le ministère de l’éducation nationale seront alors à égalité et pourront travailler main dans la main. Vous ne serez plus les hussards noirs de la troisième république mais les soldats de l’éducation nationale. En bataillons serrés...et muets.



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