On ne fera pas taire Jérôme Laronze !


Saône-et-Loire

Le 19 mai dernier un rassemblement en hommage à Jérôme Laronze, mort deux ans plus tôt sous les tirs d’un gendarme, avait lieu à Cluny (71). La famille de Jérôme Laronze revient sur ce rassemblement et sur leur combat pour obtenir justice et vérité pour Jérôme.

Le 19 mai dernier, deux ans après la mort de Jérôme Laronze, sous les tirs mortels d’un gendarme de la brigade de Cluny, nous étions tous ensemble, famille, amis, amis d’amis, anciens et nouveaux soutiens, militants, tous indignés de cette mort tragique, à lui rendre hommage à Cluny.

Nous avons marché ensemble dans les rues de Cluny pour rendre visible notre aspiration profonde de vérité et de justice.
Il y a deux ans, Jérôme a été tué de trois balles tirées par un gendarme. Il était éleveur. Il a fui pendant neuf jours l’oppression administrative et policière jusqu’à être abattu en pleine campagne par un homme représentant les « forces de l’ordre ».

Est-il normal de mourir ainsi ? Peut-on accepter d’être atteint par trois balles tirées de côté ou dans le dos sous prétexte d’ordre public et de légitime défense ? Le droit à la vie n’est-il que pure chimère ?

Cela peut sembler dérisoire de marcher pour obtenir qu’une instruction judiciaire ouverte depuis deux ans instruise ce dossier sans éluder les contradictions flagrantes entre les dépositions des gendarmes et les comptes-rendus balistiques, sans éluder la responsabilité de ceux qui ont laissé Jérôme agoniser dans sa voiture, sans aucun soin approprié, sans éluder la responsabilité de ceux qui ont permis ou favorisé la disparition d’indices de premier ordre, tels les étuis issus des tirs du gendarme mis en examen.

En France, l’action publique est portée par le parquet dirigé par un procureur de la république, représentant de l’état, tandis que l’instruction est confiée à un juge d’instruction, juge du siège, chargé d’enquêter à charge et à décharge, en vue d’établir la vérité sur une affaire.

Mais qu’en est-il quand la force publique est en cause, quand les enquêtes sont confiées aux collègues du gendarme impliqué, quand le juge d’instruction doit entendre en son cabinet des agents avec lesquels il entretient des relations de travail habituelles et dont le bon fonctionnement de son cabinet dépend en partie ?

Avons-nous alors accès à une justice libre, indépendante et impartiale ?

La réponse nous est fournie explicitement par Michel Forst, rapporteur spécial des Nations unies sur la situation des défenseurs des droits de l’homme, dans un entretien donné au journal Libération :
« Nous nous étonnons de l’absence totale de sanctions disciplinaires à l’encontre des policiers. Sur ce point, la hiérarchie policière rétorque que des enquêtes judiciaires approfondies doivent être menées avant de statuer sur une éventuelle illégitimité de l’usage de la force. Il est bien sûr fondamental que le temps nécessaire soit consacré à certaines enquêtes, mais on ne peut s’empêcher de constater une asymétrie dans la promptitude de la réponse pénale apportée. Nous avons des citoyens qui sont placés en détention provisoire, qui sont jugés en comparution immédiate, parfois sur la simple base de faits captés par la vidéo. Or, ces mêmes vidéos sont déclarées insuffisantes ne serait-ce que pour suspendre administrativement un policier ou en gendarme qui aurait eu un comportement inapproprié. Cette rapidité d’un côté et cette lenteur de l’autre envoient le signal d’une justice à eux vitesses, d’un différence manifeste de traitement entre les citoyens et les forces de l’ordre. » (Extrait Libération 13 juin 2019)

Que dire des condamnations répétées de l’Etat français par la Cour européenne des droits de l’homme, dont encore cette décision récente du 23 mai 2019, par laquelle sept juges ont rappelé « que l’obligation de protéger le droit à la vie exige de mener une enquête officielle lorsque le recours à la force a entrainé mort d’homme, …...que les autorités doivent agir d’office et qu’elles ne peuvent laisser à la victime l’initiative de déposer une plainte formelle ou d’assumer la responsabilité d’une procédure d’enquête, …..que l’instruction en elle-même a été longue puisqu’elle s’est déroulée sur près de huit années…. » (CEDH 187 (2019) 23.05.2019)

Un an après les plaintes déposées par la famille de Jérôme, à l’été 2018, pour omission de porter secours et altération d’une scène de crime, nous attendons toujours l’audition des gendarmes et enquêteurs impliqués, la tenue de confrontations entre gendarmes et pompiers intervenus sur place, l’audition du médecin urgentiste, des infirmières….

Attendre, toujours attendre, comme si l’œuvre de Justice s’accomplissait dans l’oubli !

Alors que faire, sinon marcher, dénoncer cette asymétrie de la justice et raconter son histoire ?

Nous l’avons dit, on ne fera pas taire Jérôme !

La famille de Jérôme Laronze

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Texte et photos initialement publiés sur la page facebook du collectif justice pour Jérôme



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