5 ans après la dernière Pride à Dijon. 27 juin 2020. 14h. Lac Kir. Engins à roues et roulettes décorées sont au rendez-vous. Un groupe d’une trentaine de personnes tous.tes enjoué.e.s donnent le départ d’une journée déviante. Iels se découvrent masqué.e.s, peinturluré.e.s, fardé.e.s, pailleté.e.s, perruqué.e.s… visibles et libéré.e.s.
Le cortège fait de vélos, rollers et skate prend le départ. L’euphorie pousse à occuper les voies au maximum, à bouleverser le trafic, être hors normes. Des klaxons nous saluent ainsi que d’autres courtoisies moins réjouissantes. On découvre rapidement que la ville nous escorte avec une voiture DIVIA ; merci – non merci, on gère. On notera aussi les trois flics qui nous suivent bêtement à vélo, à côté de notre voiture-balai.
La traversée urbaine se poursuit vers la gare, rue de l’Arquebuse, rue Monge, rue de la Manutention, rue de Tivoli… Les habituels bruits citadins deviennent plus doux aux sons des cris rageux et du mégaphone déchaîné. Les rues se colorent de tissus arc-en-ciel, papiers crépon, laine, pancartes et fleurs. La musique nous accompagne aussi, tout comme la joie de partager cette nouvelle manière de manifester, le vent glissant sur nos sourires satisfaits.
Les roues nous transportent jusqu’aux allées du parc pour les remontées jusqu’à place Wilson. Cette dernière ligne droite est partagée entre l’impatience de rejoindre les piétons et le désir de savourer jusqu’au bout cette pride-ride. On choisit en toute allégresse de faire le tour du rond-point Wilson.
À ce même endroit, le deuxième rendez-vous est annoncé à 15h30. Du monde est déjà dans la place. Distribution de flyers (parcours, arrêts de lecture, slogans et chant) et organisation sont de mise pour les derniers préparatifs de lancement de la marche. Quelques journalistes et photographes sont là, ne respectant pas toujours le droit à l’image et l’anonymat des participant.e.s, au risque d’outing !
Les enceintes se synchronisent, le cortège à pied se forme, banderole du feu en tête porté.e.s fièrement. Les premiers slogans sont mégaphonés. Des cris et des chants affirment les identités multiples présentes. Des arrêts sont marqués pour que les colleuses laissent une trace de notre passage en toute sécurité : « laisser les femmes s’aimer », « pas de justice pas de paix », « pas de féminisme sans nos sœurs trans », « la transphobie n’est pas une opinion », « PMA pour tou.s.tes ».
Des prises de parole prennent place(s) tout au long de la marche. Le cortège inonde la place Emile Zola. Après quelques sauts dans la fontaine, il y est lu avec révolte, un texte sur la condition actuelle de la communauté LGBTQIA+ en Pologne (la situation en Pologne est expliquée en bas de cet article ). Une démonstration claire de la journée qui se partage entre joyeusetés et revendications politiques.
Place Saint Bégnine, donne la voix à une jeune militante féministe qui vit sa première Pride. Elle crache sa colère, partage ses peurs et ses doutes identitaires, son refus de la honte. Merveilleux moments d’émotions et de mots explosifs dans sa robe à paillettes.
Place Darcy, le mégaphone délivre le manifeste haut en couleurs sur la bisexualité et la pansexualité, dénonçant la minorisation et la silenciation de ces deux orientations sexuelles à part entière.
Place de la libération, femmage à Sarah Hegazi, militante politique égyptienne qui s’est suicidée en juin 2020, suite à l’escalade de répression, de violences sexuelles et de tortures dont elle a été victime dans son pays. Le texte se termine par une invitation à une solidarité internationale des luttes LGBTQIA+.
Place du théâtre, lecture du Queer nation manifesto (1990) écrit par un groupe transpédégouine radical militant.e.s d’ACT UP new-yorkais.es, outragé.e.s par la violence homo et lesbophobe dans les rues. Texte essentiel qui manifeste la rage contre ce système hétérosexiste patriacapitaliste et raciste et proclame l’ingouvernance Queer.
La Pride se termine, plus fièr.e.s que jamais de braver le pavé blanc dijonnais sous les couleurs du drapeaux LGBTQIA+. Les chants, slogans, cris et musiques s’élèvent de plus belle sur les derniers mètres. On se nourrit à s’en gaver de cette détermination collective.
La boucle se boucle par les déclarations revendicatives du Collectif 25 novembre et de Black Lives Matter Dijon. Les revendications sont claires :
« nous exigeons la gratuité et le remboursement intégral des parcours de transitionnous exigeons l’accès immédiat à la PMA pour toutes et tous, sans discrimination de genre (alors même que les députés viennent de rejeter l’amendement pour ouvrir la PMA aux personnes trans)nous exigeons l’arrêt des mutilations et des traitements non consentis sur les enfants et les adultes intersexesnous exigeons la suppression de la mention du sexe sur l’état civilnous exigeons la dépsychiatrisation effective des trans-identitésnous exigeons une éducation sexuelle qui inclut pleinement les thématiques LGBTQIA+dans ce sens, nous appelons à une auto-organisation communautaire des luttes LGBTQIA+ à Dijonà la fin de la famille nucléaire hétérosexuelle comme modèle uniqueà une visibilisation des luttes et des personnes LGBTQIA+ »
les solidarités intersectionelles
et l’avenir de nos luttes à Dijon !
Clap de fin. Câlin collectif. C’était coloré, bruyant, joyeux, pluriel.le.s, revendicatif, à la fois festif, politique et solidaire.
Si des jeunes se découvrant transpédébigouine, ont pu expérimenter la solidarité et ne plus se savoir isolé.e.s, le pari est gagné.
C’était une joie de partager ce magnifique moment avec toutes les personnes qui se sont déplacées pour cette journée. Merci aux assos/collectifs et ami.e.s présent.e.s pour les prises de paroles et l’auto-organisation. Merci aux copaines venues en renforts.
Et la lutte continue pour le Queeristant libre !
Rest in Pride !
Podcast Pride 2020
À partir des enregistrements pris dans la manifestation, ce petit montage de 14 minutes essaie de rendre un peu de l’ambiance de cette journée complètement inédite à Dijon.
Entre autre, on y entend des témoignages de manifestant·es, et des extraits de plusieurs prises de paroles.
Pour le télécharger,
Faites un clic droit « enregistrer la cible du lien sous » sur ce lien : Podcast Pride 2020
Sur la situation en Pologne
Nous voulons exprimer notre soutien à la communauté LGBT en Pologne,
qui est à nouveau sortie dans la rue après les paroles et les actions pré-électorales
homophobes de l’actuel président, Andrzej Duda.« Cessons d’écouter ces idiots au sujet de certains droits de l’homme ou d’une certaine égalité. Ces gens ne sont pas égaux aux gens normaux » - a déclaré sur une chaine de TV Info un député du parti Droit et Justice, parti du président.
Andrzej Duda lors de sa campagne electorale a parlé de « l’idéologie LGBT ». « Nous essayons de nous convaincre que ce sont des gens mais c’est de l’idéologie » a déclaré le président.
Il a dit qu’il respectait « tout le monde », mais qu’il ne permettrait pas « l’idéologisation ».Andrzej Duda a signé une déclaration de programme le 10 juin, qu’il a appelée la « carte de famille ».
Le président candidat à la réélection a déclaré que « pour chaque Etat, la famille est le fondement de son existence ». « La Carte » est un ensemble de promesses électorales liées à la famille, et une partie de ce programme attaque directement les personnes LGBT en les présentant comme une menace dont il faudrait se défendre. Le document contient aussi des sous-sections « défense de l’institution du mariage » et « protection des enfants contre l’idéologie LGBT ».La première affirme que le mariage est une relation entre une femme et un homme – pas de possibilité de mariage pour les couples hors norme et « pas de consentement à l’adoption par des couples homosexuels ».
Dans la deuxième section nous lisons cette fois qu’il s’agit « d’une interdiction de propager l’idéologie LGBT dans les institutions publiques », « du droit des parents de décider dans quel esprit ils éduqueront leurs enfants » ou « d’une influence décisive des parents sur la forme et le contenu des activités parascolaires ». Il a également été déclaré que « ce sont principalement les parents qui sont responsables de l’éducation sexuelle ».
La dernière des dispositions, qui est censée « protéger contre l’idéologie LGBT » est la facilitation pour les parents de mener une éducation domestique en marge de l’école laïque.« La carte de famille est un engagement que je respecterai strictement en tant que président de la République de Pologne. Ce sont les principes que je suivrai lorsque je déciderai de signer les lois adoptées par le Parlement polonais » - a t-il expliqué à la fin.
Qui suis-je dans mon pays si je ne suis pas un citoyen ?
Si je suis Ideologie, ca veut dire que je n’existe pas ?
Pensez-vous que je ne devrais pas me marier ?
Un couple de même sexe avec un enfant devrait-il quitter son pays pour vivre en sécurité ?
Est-il normal que les enfants LGBT se suicident parce que personne ne les soutient ?
Compléments d'info à l'article
Proposer un complément d'info