Lundi 11 octobre, Fabien Bauduin, ancien responsable syndical à Solidaires 21 était jugé au tribunal correctionnel pour « participation a un groupement en vue de la préparation de violences contre les personnes ou de destructions de biens ». L’affaire concernait une manif ayant eu lieu en... 2018 !
Le 1er décembre 2018, acte III des gilets jaunes, Fabien Bauduin participait à cette manifestation historique, pendant laquelle des affrontements avaient eux lieux tout l’après-midi dans la rue de la Préfecture. Comme ailleurs en France, les flics avaient été complètement débordés par les manifestant·es et avaient du se contenter de protéger la préfecture de manière statique, repoussant les assaut des émeutier·es.
Pour le pouvoir un tel affront ne pouvait pas rester impuni, et c’est donc Fabien Bauduin qui allait en faire les frais. Dés le lendemain François Rebsamen avait déclaré dans la presse regretter « qu’il n’y ait pas plus d’interpellations, qu’un ex-syndicaliste connu de tous ne soit pas interpellé alors qu’on sait qu’il dirige les manifestations » [1]. Le syndicaliste en question avait finalement été interpellé à son domicile le 18 décembre, les flics lui notifiant sa mise en examen le soir même.
Le prétexte invoqué par la justice pour justifier son acharnement contre Fabien Bauduin ? Pendant toute la manif ce dernier avait filmé et retransmis en direct la manifestation sur les réseaux sociaux, en l’agrémentant de ses commentaires. « C’est magnifique ! », « C’est la Saint Macron », ou encore « C’est symbolique, Joyeux Noël ! » devant les sapins qui brûlent devant les grilles de la mairie. Il portait par ailleurs une oreillette et un talkie walkie, ce qui témoignait selon le proc de sa présence en qualité de meneur.
À la barre Fabien Bauduin s’explique : « ces petites phrases étaient là pour traduire la situation ahurissante et violente qui nous dépassait tous ». « Quand aux Talkies-walkies, ils m’ont permis de rester en contact avec les membres de mon syndicat. Je n’ai jamais dirigé la foule, et si à un moment on me voit faire des gestes de la main, c’est pour demander aux gens de ne pas courir afin d’éviter les bousculades et les accidents. »
Le nouveau procureur de la république Olivier Caratoch n’en réclamait pas moins 8 mois de prison avec sursis, 2.000 euros d’amende et 5 ans de privation de droits civiques.
« Dans le chaos, vous êtes resté d’une grande sureté et d’un professionnalisme remarquable. Vous avez filmé pour téléguider les gens, vous avez pu donner des directives et incité les gens à passer à l’acte. Jamais, on ne vous entend dire que ce qui se passe sous vos yeux est inadmissible. » Un véritable délit d’opinion !
À décharge pour le syndicaliste, un témoignage... du commissaire de police en fonction ce jour là, qui dans son rapport affirme que Fabien Bauduin n’a jamais été identifié comme un des meneurs de cette manifestation. Son avocat Jean-Baptiste Gavignet a donc réclamé la relaxe, accordée par le tribunal « non pas sur un vice de procédure, mais bien sur le fond de l’affaire et sur le droit ».
Trois ans plus tard, le spectre des gilets jaunes hante encore les mémoires de la bourgeoisie dijonnaise. Comment expliquer autrement l’acharnement du parquet contre un syndicaliste qui s’est manifestement contenté de filmer et d’exprimer sa joie - largement partagée - devant la vision des flammes léchant la porte des palais ? Il faut dire que durant ces trois années, aucun des problèmes qui avaient poussé les gilets jaunes à se révolter n’a été résolu, la plupart ont même empiré. Les tenants du pouvoir le savent, ils ont peur, et ils ont raison d’avoir peur.
Un manifestant dijonnais
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