À Besançon, les royalistes espèrent un renouveau


Doubs

Dieu, la terre, le roi ; à Besançon, ils ne sont qu’une petite poignée à scander ce leitmotiv. Mais propulsés par l’ascension de l’extrême-droite et la vitrine qu’offre les réseaux sociaux, les partisans de Maurras entendent assumer leur existence.

Ouverture d’un compte Instagram, collages nocturnes dans le centre historique, détournement de l’affaire Lola… Malgré une propagande tapageuse, le succès est encore bien modeste. C’est qu’entre agressions politiques et violences conjugales, le profil d’un des principaux meneurs pourrait bien freiner des vocations.

L’Action Française (AF) est une des plus anciennes formations d’extrême-droite, combinant exaltation de la chrétienté, du sentiment national, et du retour de la monarchie. Elle fut en grande partie conceptualisée par Charles Maurras, devenant un puissant centre de formation et jouissant d’une popularité considérable. Éminente jusqu’au milieu du XXe siècle, elle tombe en disgrâce avec la Collaboration. Aujourd’hui grabataire, elle reste néanmoins la référence des fétichistes au trône. Ainsi la fédération de Bourgogne a survécu autour d’une poignée d’adeptes principalement actifs à Dijon et Chalon-sur-Saône [1], dont un temps le fils du procureur Jean-Jacques Bosc [2]. Une solitude désormais brisée, un compte « Besançon royaliste » venant d’apparaître sur Instagram pendant que des visuels à la fleur de lys germaient dans la vieille-ville. La preuve d’une implantation ? Officiellement, rien n’a été formalisé par la maison-mère ou ses modestes rivales.

Il faut dire que pour les rares successeurs qui ont repris le flambeau de Louis XVI, il est parfois difficile de s’y retrouver… tant les scissions sont légions, mais aussi les cafouillages. À l’image de Mattheo Bachetti aujourd’hui chez « Génération Zemmour » (GZ), individu qui exhibait à la fois des symboles légitimistes et orléanistes durant les manifestations anti-pass sanitaire. Dans ce même élan, on a observé, parfois, sur le mobilier, côte-à-côte, les couleurs d’entités ennemies [3]. Une vision singulière de la cohérence, qui aurait aussi agacé un certain Vital Voidey. Demeurant dans le village de Serre-les-Sapins avec sa famille, le jeune homme de vingt-quatre ans est actuellement étudiant. En master de philosophie à Besançon, il s’est récemment illustré par un exposé intitulé « le droit des héros. » Tout un programme. Le chefaillon autoproclamé n’en est pas moins également engagé sur la fac’, étant une des petites mains du groupuscule « Cocarde Étudiante. »

PNG - 580.5 ko
Vital Voidey, lors de l’agression du 22 août 2022 à Besançon.

C’est avec Théo Giacone, Arthur Fillod et Thibaud Reuche qu’il agressera un journaliste indépendant le 22 août dernier [4]. Les brutalités, Vital Voidey sait ce que ça veut dire ; selon nos informations, celui-ci a déjà été condamné pour des violences conjugales. Si le personnage cultive une « discrétion proche de la paranoïa », nos sources l’affirment : « organisation concrète, entretiens avec les recrues, gestion des plateformes de discussion, il n’en est pas moins derrière tout cela. » Les prouesses restent toutefois encore minces sur le terrain, à l’exception donc de quelques stickers fièrement photographiés pour une communauté très virtuelle. La nécromancie, c’est aussi ça la magie des réseaux sociaux. Dernière performance militante dans la nuit de dimanche à lundi, la récupération du meurtre de Lola [5] : un collage sous la lune, au fond d’un parking de Rivotte. Seul risque encouru, ne pas se tromper dans la coordination de la trentaine de feuillets.

L’auteur de violences sexuelles et sexistes est-il légitime pour porter la voix d’une victime ? À cette question, un camarade de Vital Voidey pourrait peut-être légitimement répondre. Un appel au rassemblement avait été lancé à Besançon, avec une date fixée au samedi 22 octobre à 09h00 sur la bien nommée place de la Révolution. Au final un bide total initié par le dénommé Jean-Baptiste Batifoulier, passé par le RN puis GZ mais surtout connu pour son passif de violeur [6]. Si la « lepénisation des esprits » tourne à plein, l’éventualité qu’un plébiscite soudain adoube un régime fondé sur le sceptre et le crucifix ne semble pas tout à fait gagné. Reste toujours la xénophobie, l’antisémitisme, et la haine de tout progressisme, tête de gondole opportunément exhibée pour faire recette. Dans la capitale comtoise, ils ne sont que quelques-uns à faire vivre ces idées… mais pas sur que le curriculum vitae de ce noyau dur aide vraiment à faire décoller les adhésions.

Ourson mignon pour la Nuée – antifa FC.



Notes

[1Toufik-de-Planoise pour Dijoncter, édition papier - numéro quatre (avril 2021-avril 2022), pages 47 à 54 : « l’extrême-droite en Bourgogne/Franche-Comté » ;

[2Dijoncter, édition du 9 avril 2022 : « Immersion au sein de l’extrême-droite... de son visage le plus séduisant, à ses travers les moins avouables. Parcours d’une égérie nationaliste, un fils de procureur adepte de ratonnades » (lien) ;

[3Le mardi 25 octobre, un témoin retrouvait ainsi, près de la permanence « les Républicains », un autocollant « Action Française », d’obédience orléaniste, et, à deux pas, un autre visuel émanant cette fois du Groupe d’Action Royaliste, de tendance légitimiste ;

[4Pierre Plottu et Maxime Macé pour Libération, édition du 24 août 2022 : « Besançon : des militants d’extrême droite agressent un journaliste » (lien) ;

[5Juliette Campion et Antoine Comte pour France info, édition du 20 octobre 2022 : « Meurtre de Lola : comment l’extrême droite tente de récupérer l’affaire à son compte » (lien) ;

[6Dijoncter, édition du 5 avril 2022 : « [Besançon] Jean-Baptiste Batifoulier, pointeur de son état » (lien).

Proposer un complément d'info

modération a priori

Ce forum est modéré a priori : votre contribution n’apparaîtra qu’après avoir été validée par un administrateur du site.

Qui êtes-vous ?
Se connecter
Votre message

Pour créer des paragraphes, laissez simplement des lignes vides.

Lien hypertexte

(Si votre message se réfère à un article publié sur le Web, ou à une page fournissant plus d’informations, vous pouvez indiquer ci-après le titre de la page et son adresse.)

Ajouter un document

Articles de la même thématique : Royalisme

À la Fraternité Saint-Pierre de Dijon, des soutiens pas (toujours) très catholiques

Par un communiqué paru le 17 mai dernier, Monseigneur Roland Minnerath a déclaré ne pas reconduire le ministère de la Fraternité Sacerdotale Saint-Pierre (FSSP). Au sein du Diocèse de Dijon, la nouvelle a fait l’effet d’une bombe. Officiellement, les parties communiquent sur un litige d’ordre purement organisationnel et pratique. Mais d’autres sources affirment que les connivences entre traditionalistes et extrême-droite radicale auraient également pesé. Il s’avère en effet que nationalistes, royalistes, et autres néonazis, apparaissent très présents de ce côté là du Tout-Puissant.

Articles de la même thématique : Action Française

Panorama de l’extrême droite franc-comtoise

Ce travail a été effectué par la Nuée Antifa de Besançon, après des mois de récupération d’information et pour essayer de donner un panorama de la présence de l’extrême droite autour de Besançon et dans la Franche Comté. Un article proposé par La Horde.