Pour un urbanisme participatif, sobre et soutenable de l’agglomération dijonnaise

Nous, Collectif d’associations agissant, entre autres, dans nos quartiers et communes pour la promotion et la défense de l’environnement de la métropole dijonnaise, prenons la parole dans le cadre de l’enquête publique relative à la modification du Plan Local d’Urbanisme intercommunal Habitat et Déplacements (PLUi-HD).

Nous interpellons les habitants, les associations et les élus de l’agglomération dijonnaise pour qu’ils donnent leur avis sur des projets qui les concernent eux-mêmes, mais aussi leurs enfants et petits-enfants. Cette enquête publique est une occasion unique pour s’exprimer, et ce jusqu’à sa date de clôture du 3 décembre à midi.

Selon nous, l’habitat hyper-dense imposé par le PLUi-HD dans l’agglomération de Dijon oublie les besoins essentiels des habitants en matière de services, d’espaces de nature, de qualité de vie dans les quartiers et les communes périphériques.

Plutôt que de lire les XX pages de ce Plan, empruntez l’avenue Jean Jaurès, les rives de l’Ouche et du canal, l’avenue du Drapeau, le boulevard Voltaire, visitez les sites ex-Engrenage, Écocité des Maraîchers, place centrale-Quétigny, CIGV ... et vous constaterez la réalité qu’implique ce règlement d’urbanisme.

Notre collectif publie ici un texte qui présente nos réflexions et propositions pour l’avenir, dans un contexte de crise climatique, sanitaire, économique et sociale.


Les effets du changement climatique altèrent profondément l’équilibre de vie dans les grandes villes, et notamment pour les personnes les plus fragiles. Dans ce contexte, nous appelons les élus de Dijon Métropole à se saisir de l’opportunité de cette modification du PLUi-HD pour demander sa révision afin d’apporter de véritables changements dans le développement urbain et la fabrication de la ville et nous incitons les habitants à profiter de cette occasion pour exprimer leurs inquiétudes sur la sur-densification de l’agglomération.
Les enjeux sont de garantir aux habitants actuels et futurs une vie supportable dans les années à venir, en dépit d’épisodes climatiques extrêmes récurrents, notamment les canicules et les inondations. Cela passe par une révision des ambitions de croissance de l’agglomération, un discernement dans l’usage des terrains selon leurs natures, un changement profond des modes de construction et un réinvestissement des locaux vacants, le tout en large co-construction avec les habitants, les usagers et les aménageurs des communes.

Vouloir grossir à tout prix : le premier écueil

Le PLUi-HD actuel repose sur des prévisions de développement constant et croissant de la population et des activités “économiques” gourmandes en infrastructures et bâtiments. Dans le contexte de crise économique, écologique et sociale que nous vivons ces prévisions ne paraissent pas justifiées pour l’agglomération dijonnaise. La densification proposée implique une captation métropolitaine des services, des transports publics, des zones d’emploi et d’habitat, de la ressource en eau qui, en contribuant à la désertification des territoires proches, amplifie le clivage entre les zones urbaines et les zones rurales. A la place, un développement équilibré du territoire impose une autre répartition des activités et de l’habitat avec, notamment, un réseau de transports publics structurant.

En prévoyant l’urbanisation de 480 hectares d’espaces naturels et de terres cultivables entre 2020 et 2030, le PLUi-HD hypothèque gravement une part importante d’autonomie alimentaire du territoire et la réserve d’espaces de respiration au risque d’une vulnérabilité alimentaire, climatique, sanitaire et sociale dans les années à venir.

Alors que le PLUi-HD planifie les projets sur 10 ans, les constructions et infrastructures sont érigées pour des décennies : les choix d’aujourd’hui auront un impact pour les 80 à 100 ans à venir.

Revenir aux besoins fondamentaux des habitants

Les études en neurosciences et en anthropologie le montrent depuis plusieurs années : pour être en bonne santé, l’humain a besoin d’un mode de vie connecté aux réalités biologiques que sont la relation avec la terre et les organismes vivants, le rapport aux saisons et la capacité à produire sa propre nourriture. Rappelons que ces besoins prévalent pour tout un chacun, quelles que soient son origine sociale ou sa catégorie socio-professionnelle.
L’habitat urbain de demain doit être réfléchi et adapté pour mieux protéger l’humain des stress climatiques à venir, tout en permettant cette connexion, sans besoin de longs déplacements. Il s’agit de concevoir des logements vivables, sous forme d’habitat s’ouvrant sur des espaces naturels pour répondre aux besoins d’espaces verts de tout un chacun. Le bien-vivre ensemble requiert aussi d’amoindrir les bruits de l’environnement immédiat, la pollution sonore due à la sur-densité étant un mal latent.

Prendre soin des espaces naturels, de la terre nourricière et de la biodiversité

Pour pouvoir assurer la résilience alimentaire de l’agglomération dijonnaise, iI faut préserver un maximum d’espaces de pleine terre pour les dédier à une agriculture maraîchère urbaine et péri-urbaine. Par ailleurs, des espaces de pleine terre, consacrés aux jardins partagés et au développement et à la réserve d’espaces verts arborés, participent à la lutte contre les îlots de chaleur urbains.

Proposer, dans de nombreux secteurs, un taux de 30 % de pleine terre et de seulement 10 % pour les terrains jusqu’à 300 m² est insuffisant pour répondre à cette nécessité vitale. Combien de jardins, d’alignements d’arbres, de maisons, d’espaces de “respiration” détruits par une telle mesure ?

Nous demandons à ce qu’un audit et inventaire détaillé des sols soit réalisé pour pouvoir caractériser et sanctuariser le maximum de zones de pleine terre en incluant les cœurs d’îlots.

L’infiltration des eaux pluviales est également un enjeu pour éviter les inondations liées aux futurs épisodes pluvieux intensifs et pour assurer le remplissage des nappes phréatiques. Un objectif optimal de libération des sols pour le cycle de l’eau doit être fixé aux alentours de 60 %. Il pourrait passer par une désimperméabilisation - ou une non imperméabilisation - imposée aux zones d’activité et d’habitat existantes ou en projet. Sachant qu’il faut 10 à 20 ans pour restaurer la qualité organique d’un sol précédemment recouvert d’asphalte, il est urgent d’agir.

La réintroduction du végétal et le maillage des quartiers par une trame verte peuvent seuls permettre le maintien d’une biodiversité ordinaire, mais néanmoins fonctionnelle en milieu urbain, comme refuge de la flore et de la faune associée, et comme espace privilégié de rencontre des habitants entre eux et avec la nature. La sauvegarde de la majorité des arbres existants en ville et la plantation de nouveaux, sont essentielles. Les arbres ont des effets favorables reconnus et importants de régulation des températures, de réduction de la pollution et du bruit, de capture du CO2. Les sites de projets inscrits au PLUi-HD, ainsi que des toitures végétalisées de faible épaisseur (30 cm), particulièrement valorisées par le règlement, ne garantissent ni la préservation de la “trame verte et bleue”, ni sa restauration.

Faire du “BTP”, mais autrement

Responsable de l’émission de 9 % des gaz à effet de serre mondiaux, la construction de bâtiments en béton est particulièrement gourmande en matières premières dont l’extraction provoque une forte pollution, en partie dans des pays pauvres. Le territoire se retrouve dépendant de ressources qui viennent du bout du monde.

Un urbanisme sobre et soutenable repose sur des méthodes de constructions alternatives, telles les basses technologies, auxquelles il faut recourir pour assurer la pérennité de l’acte de construire pour les générations futures, auxquelles s’ajoute un plan de rénovation et d’isolation du bâti ancien.

Ainsi, le PLUi-HD doit encourager les constructions en matériaux naturels et locaux : la désormais connue « ossature bois » mais aussi le BTP - « Bois Terre Paille », et le « Chaux-Chanvre », par exemple. Les règles d’urbanisme doivent privilégier ces méthodes et ce plan qui présentent les intérêts de faire travailler des entreprises locales, de réduire les nuisances liées aux bruits des travaux qui dégradent le cadre de vie des dijonnais et d’être moins énergivores à la construction et thermiquement plus efficaces.

Ces choix nécessitent de nouvelles formations aux métiers du bâtiment ainsi qu’une organisation rigoureuse de nouvelles filières locales durables sans surexploitation des ressources.

Ménager plutôt qu’aménager la ville

Répondre au besoin en logement pour des personnes à revenus modestes est bien pour nous une priorité. Or, les ONG l’expliquent depuis des années : au-delà d’un logement, les personnes touchées par la précarité ont besoin de l’accès à l’ensemble de leurs droits (emploi, santé, mobilité, etc.). Résumer la prise en compte de leurs difficultés à la construction de logements, pouvant s’avérer inadaptés, est une illusion.

Pour inclure chaque personne, une réflexion globale doit être menée sur le patrimoine construit déjà disponible sur l’agglomération dijonnaise. Combien de bureaux vides ? Combien de locaux commerciaux et d’appartements vacants ? Il faut recenser toutes ces ressources disponibles pour définir ensuite, en cohérence, le réel besoin de construction.

Une architecture soucieuse du bien-être des habitants, ce sont des constructions de taille raisonnable, dotées de larges espaces verts et de rencontre et respectant l’identité des quartiers, les maisons existantes ainsi que le patrimoine. Nous disons stop aux rues “canyons”, aux immeubles massifs, sans vue de plus de 4 étages. Qualité de vie et apaisement des quartiers sont à ce prix.

La méthode : ANTICIPER et CO-CONSTRUIRE

Toute action d’urbanisme doit être précédée d’une analyse menée par des experts indépendants aidés par les habitants, experts de leur quotidien, pour prévoir au mieux ses impacts environnementaux globaux et les orienter dans un sens favorable.

Partir des besoins réels des habitants d’un quartier et des usagers d’un service, c’est non seulement prendre en compte l’avis des personnes, mais, c’est aussi garantir l’utilité sociale et environnementale d’un aménagement.

Parce que l’avenir de chacune et chacun est en jeu, quels que soient son âge, sa catégorie socio-professionnelle, son lieu de vie, nous vous exhortons à une concertation globale, et surtout une co-construction des projets avec les riverains pour le moindre aménagement dans leur quartier.

Bien loin d’un malthusianisme latent auquel il serait faux de l’assimiler, notre démarche vise un urbanisme conçu pour le bien de tous, dense en échanges immatériels, mais réels, et intense en partages humains.

Associations signataires :
Bien Vivre dans le quartier Larrey - Cayen Environnement - Comité de Quartier de la Montagne Sainte-Anne - Ensemble pour Chenôve - Les Amis des Hauts de Dijon - Les Ami-es des Jardins de l’Engrenage - Les Habitants de Mirande-Montmuzard-Université de Dijon (H2MU) - Les Riverains du Quartier de Larrey - Patrimoine Environnement Bourgogne Franche-Comté - Quétigny Environnement

avec le soutien de :
Collectif Montmuzard - Fédération Syndicale Unitaire 21 - France Nature Environnement Côte-d’Or - L’Atelier d’écologie politique "Penser les transitions" (université de Bourgogne) - Les Amis de la Terre Côte-d’Or - Union syndicale Solidaires 21 - ATTAC 21 - Bien vivre aux Marronniers et environs - Les Ami-es des Lentillères.



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