France, propriété privée, s’essuyer les pieds sur le paillasson à l’entrée !



Ils s’appellent Manon et Ismaël. Ils voudraient vivre d’amour et d’eau fraîche. À la place, depuis le 8 décembre, ils ont le droit à un brouet saumâtre, une OQTF, obligation d’aller boire de l’eau fraîche ailleurs !

Vous avez lu ce type de texte des centaines de fois, seuls les prénoms changent ? Confirmation. Dans la France de 2021, de Darmanin, des préfets, des candidats aux présidentielles qui réinventent la figure du métèque pour obtenir des voix, l’histoire d’Ismaël n’est même pas exemplaire, juste banale.
Il est guinéen, arrivé mineur en France, pas pour manger le pain des français mais pour sauver sa peau. Hélas, peu de nos hommes politiques ou hauts fonctionnaires ont eu à « sauver leur peau ». Tout au plus, certains d’entre eux feront-ils état d’une enfance modeste, entourés par des parents laborieux et méritants qui croient à l’ascension sociale par l’école républicaine. Pour le reste, ils ont peu d’imagination et peu de capacité à l’empathie.
Ismaël n’est donc pas né en Charente Maritime mais à Conakry. Il a fui son pays, pas par choix (tiens, je vais visiter la Tour Eiffel et goûter les fromages de Bourgogne Franche-Comté) mais par nécessité (et si je ne crevais pas à l’endroit où je suis né ?). Peu au fait des quotas en matière d’immigration, des interdits administratifs en Gaule, il a cru que son statut d’être humain suffisait à lui ouvrir les portes du monde. Quel naïf ! Le préfet de Côte d’Or, et ses collègues partout en France, veillent au grain. Et d’évoquer le pragmatisme, la législation, la gestion des flux migratoires, l’immigration positive, la chasse aux clandestins polygames, aux fauteurs de troubles interlopes, aux musulmans tentés par l’extrémisme, aux profiteurs nourris par les allocations familiales ou l’assurance chômage , j’en passe et des meilleurs, la liste reste ouverte.
Sans le savoir, sans le vouloir, le migrant a toujours une case qui l’attend et qui, comme au Monopoly, s’appelle « départ » après passage en prison, pardon, en CRA, centre de rétention administratif.

Je pourrais vous parler d’Ismaël, mettre en avant ses qualités, son incroyable-capacité-à-s’intégrer, son apprentissage fulgurant de la langue française, celle de Voltaire bien sûr, pas celle de Le Pen ou Zemmour (pauvre Voltaire, s’il avait su qu’un jour, il servirait d’alibi aux pires canailles ! ). En fait, je n’ai pas envie de jouer cette partition aux accords plus que parfaits.
Il faut le savoir, un migrant, « régularisable », ne l’est que sous certaines conditions, en général pour neuf mois, le temps d’une gestation. Il se doit d’être exemplaire ou héroïque (sauver un enfant breton sur le point de tomber du 12e étage par exemple). Pour remplir le cahier des charges de l’exemplarité, ne pas oublier de remercier le Conseil départemental, l’aide sociale à l’enfance, surtout, ne jamais avoir un retard à l’école, une mauvaise appréciation sur un bulletin scolaire, une amende dans les transports en commun et puis remercier le patron qui fait bosser la nuit sans payer les heures (tous ne ressemblent pas hélas à Stéphane Ravacley !) , être humble en toutes circonstances et dire merci à la dame charitable qui s’occupe de vous. Un boulot à plein temps l’exemplarité.
Les autres, irrécupérables autant qu’inconscients, ceux qui ont piqué au supermarché pour se nourrir, qui squattent des lieux interdits, qui survivent comme ils peuvent par impossibilité de déposer un dossier au guichet 8 car manque le formulaire à l’acronyme en douze lettres, sont des « menaces à l’ordre public », accusés de produire de faux actes de naissance (aucun pays d’Afrique n’échappe à la suspicion généralisée) qu’il faut donc éradiquer, en prenant à témoin la France des braves gens qui en bavent, fantasme sociologique à la mode chez les candidats en avril 2022 au poste suprême de chef des préfectures.
Et Ismaël dans tout cela ?
Comme il est écrit dans la pétition, il ne refera pas le chemin à l’envers. Retourner en Guinée ? Et pour quoi faire ? Que les personnes de sa famille qui lui en voulaient d’être né achèvent le travail ? Qu’il renonce à son amoureuse avec qui il vit, à sa famille d’adoption, à ses amis ? Qu’il se sente coupable, par nécessité vitale, d’être allé voir ailleurs afin d’échapper au déterminisme du « pays d’origine » ?

Donc, une pétition.

Dérisoire ?

Non.

Inutile ?

Non.

Faire connaître les politiques des préfectures en matière d’immigration, leurs bidouillages douteux, leurs demi-mensonges, leurs fausses statistiques, leurs erreurs dans les dossiers, leur racisme ordinaire maquillé en vertu républicaine, est un devoir.

Ismaël, Manon sont ensemble, à Dijon et n’ont pas pour projet de prendre l’avion pour les fêtes, même tous frais payés, pour passer l’hiver en Afrique de l’ouest.

Le lien :

https://chng.it/RBdPdWXP

Merci si vous signez et diffusez !



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