Alors que la plupart des dijonnais·es sont sous le choc et tentent doucement de comprendre ce qui a pu se passer aux Grésilles, il y en a qui ne perdent pas leur temps en analyses, et se permettent de nous resservir leurs vieilles soupes dès que le mot "quartier" apparaît...
Marine Le Pen est donc venue à Dijon pour faire son beurre sur le dos des Grésilles.
"Sur place" oseront dire certains journaliste, pour désigner la salle confortable de l’hôtel Ibis à côté de la gare...
Barrer la route au RN
En pleine manifestation pour soutenir les soignant·es, dans le centre-ville de Dijon, le mot circule vite parmi la foule. Pour beaucoup, il est impossible de laisser le Rassemblement National venir recoder la situation avec leurs grilles de lectures racistes. Même si nous avons du mal à comprendre ce qui s’est passé aux Grésilles, une certitude est partagée largement : le racisme d’État ne sera jamais une solution.
Nous sommes entre 200 et 300 devant l’hôtel Ibis. Nous comprenons assez vite que nous sommes au bon endroit, étant donné la présence de journalistes parisiens sapés comme jamais à Dijon. Coup d’oeil plus précis : il s’agit de TF1... Sans dec’...
Pendant une heure, nous crions des slogans sans réussir à savoir exactement si notre présence a un impact ou pas sur la conférence de presse prévue. Il semblerait que notre présence a été plutôt efficace puisque Marine Le Pen affirmera plus tard dans la presse : « Nous avons attendu une heure sur un parking, en attendant que les policiers se mettent en place. Et j’avoue qu’au bout d’une heure, j’ai pris la décision de venir coûte que coûte ».
Alors que son "cortège" de voitures décide donc de "venir coûte que coûte", nous bloquons la route et essayons d’empêcher rapidement les voitures de passer. La scène durera 1 minute, quelques coups de pied un peu désespérés sont donnés dans une des voitures lorsqu’elle passe. "Agression extrêmement grave" d’après la presse, reprenant les termes de Le Pen... Effectivement, on a du mal à se représenter la violence du choc qu’a subi cette Ford Bleu...
On notera au passage la reprise des termes de Trump, Le Pen parlera par la suite de "miliciens antifas ultraviolents".
Alors que Le Pen se remet de cette "grave attaque à la vie démocratique" pour occuper la très grande place médiatique que lui déplient les journalistes, nous nous faisons gazer comme il faut sur le trottoir.
Détruire les discours coloniaux
Que dira-t-elle finalement ?
Rien de très nouveau, évidemment. Pour elle la "situation dijonnaise" est la conséquences des politiques mutliculturalistes dont Rebsamen serait un fervent représentant (au vu de la blancheur criante de la rue de la Lib’, on reste perplexe...). L’immigration serait bien sûr LA cause première des affrontements des Grésilles, développant un discours abominable de racisme, parlant des "porteurs de querelles qui sont complètement étrangères [à la France]" qui seraient "peu férus d’Histoire" puisqu’ils sont "souvent de nouveaux arrivants", glissant rapidement des protagonistes des affrontements à n’importe quel·le habitant·es des Grésilles en affirmant que "les familles délinquantes de ce quartier doivent être expulsées de leurs logements sociaux".
Elle réaffirme à de multiples reprises, sans aucune réserve, que les personnes impliquées dans les affrontements seraient évidemment des "étrangers", dressant un portrait d’une France pacifique, où les rixes de ce type ne pourraient être qu’un produit d’importation.
Aides sociales, logements sociaux retirés, moratoire sur l’immigration, droit d’asile annulé, le RN ressort ses vieilles formules, dont une seule nous fera sourire : le portrait de Rebsamen "bredouillant et groggi".
Un axe pourtant est particulièrement mis en avant : celui de la "reconquête territoriale". Le vocabulaire utilisé est exactement celui du colonialisme, faisant certainement mouiller tou·tes les nostalgiques de la France Empire. Les Grésilles sont désignées comme un territoire étranger à reconquérir, un quartier "en sécession territoriale et judiciaire qui s’affirme sans complexe". Cette conquête territoriale s’exprime très géographiquement, puisque Le Pen parle de "chaque mètre carré de perdu".
Face à ces affirmations xénophobes et coloniales, nous pensons aux habitant·es des Grésilles dont certain·es ont pu décrire l’alternance violente entre la sensation d’être abandonné·es par la police et celle d’être confiné·es dans une zone sur-fliquée.
Nous refuserons et nous nous opposerons toujours à ce que quiconque puisse désigner ce quartier comme un lieu à conquérir. Les Grésilles sont à leurs habitant·es, il s’agit aujourd’hui de leur donner la parole et de les soutenir.
Sale semaine pour Marine Le Pen qui se fait dégager de l’île de Sein le lendemain :
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