[Besançon] Les syndicats étudiants vent debout contre l’implantation de l’extrême-droite à l’UFC


Doubs

Si elle ne représente encore aucun poids électoral ou militant au sein de l’Université de Besançon/Franche-Comté, la « Cocarde Étudiante » pourrait néanmoins déjà faire l’unanimité contre elle.

Constituée à partir de la rentrée 2021, cette formation d’extrême-droite et ses quelques membres multiplient les prises de positions véhémentes. Proche du « Rassemblement National » (RN), sa base s’avère presque exclusivement constituée de cadres issus du parti Lepéniste. Lesquels collectionnent aussi les dérapages, scandalisant aujourd’hui les autres syndicats. Enquête.

« Ces discours de haine n’ont pas leur place à l’Université ! »

À l’UFC les récriminations isolées se sont muées en un « front syndical » inédit, touchant jusqu’aux cercles « conservateurs » et structures du secondaire. L’objet de la discorde, ce sont les positions de la « Cocarde Étudiante » dont de récentes révélations ont opérées comme un détonateur. « À travers leurs documents et sur les réseaux sociaux, leurs activistes s’en prennent aux immigrés et aux prétendus islamo-gauchistes. Lorsque l’un d’eux écrit que les musulmans sont des violeurs et des pilleurs, le débat n’est plus possible » indique ainsi un adhérent de la « CGT Salarié.e.s-Étudiant.e.s. »

Même constat à l’UNI Franche-Comté, proche de « Les Républicains » (LR). Si aucune réaction officielle ne nous est parvenue, des sympathisants ont confié leur amertume… lassés des critiques qui leur seraient adressées, comme sur « Twitter » le 24 novembre dernier. « On partage certaines analyses bien sûr, mais leur comportement sectaire y compris vis-à-vis des autres tendances patriotes les disqualifient » avance un interlocuteur. Notons que l’antenne comtoise fut jadis présidée par un certain Jacques Ricciardetti, figure du « Rassemblement National » (RN).

D’autres références se sont exprimées, à l’instar de « la Voix Lycéenne » (VL). « À Besançon, beaucoup d’entre nous vont aller à l’UFC l’année prochaine. On constate tous qu’en parallèle de la surmédiatisation des idées d’extrême-droite, racistes, sexistes, réactionnaires, il y a des passages à l’acte bien réels. L’université, comme le lycée, sont des lieux de savoir et d’émancipation qui doivent être les premiers préservés des discours de haine, de méfiance ou discriminatoires. Ces idées doivent rester dans les poubelles de l’histoire » soutien Colin Champion, son responsable.

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Cour intérieure de l’UFR SLHS de Besançon – Ludovic Godard

Une controverse initiatique en 2020.

Pourquoi une telle levée de boucliers ? Afin de comprendre ce dossier, il faut approfondir les intrigues de la « Cocarde Étudiante. » Sa chronologie débute lors des élections universitaires des 15 et 22 mars 2020, avec la liste attrape-tout « Union Estudiantine de l’Université de Franche-Comté » (UEUFC). Elle est menée par Marvin Beurton, avec à ses cotés Théo Giacone, Jean-Baptiste Batifoulier, ou Florise Prétet. Les quatre sont très marqués à droite, une composition disséquée par le journal indépendant « Factuel.info » dont l’article provoque d’importantes dissensions internes.

Arguant découvrir cet aspect, quelques dix colistiers avaient annoncé leur retrait immédiat. Ce qui reste des figurants est dès lors apparenté à un « regroupement nationaliste », malgré un communiqué d’explications… se concluant en demandant « comment pourrions-nous défendre les intérêts de tous les étudiants si nos propositions ont pour socle une idéologie déterminée ? » Quelques mois plus tard, cette résolution d’ouverture semble avoir été révisée par la création de la « Cocarde Étudiante. » Avec l’ensemble des individus cités, exception de Beurton parti à Lyon.

Initiée début 2021 mais active à partir de la rentrée suivante, l’émergence de cette section comtoise recouvre le leitmotiv de la maison-mère : « Patrie, Souveraineté, Identité. » Elle s’accompagne de soirées au « pub de l’Étoile », ainsi que d’opérations massives de collages et tractages jusque dans l’enceinte même de l’Université. Une stratégie tapageuse mais aux résultats limités, puisque depuis les effectifs n’ont guère évolué au-delà du cercle de fondateurs. Car si l’organisation se déclare « indépendante », les liens avec le « Rassemblement National » (RN) sont pourtant flagrants.

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Steven Fasquelle et Théo Giacone prenant la pose devant un collage mixte Cocarde Étudiante/Rassemblement National, le 24 novembre 2021 devant l’UFR SLHS de Besançon – capture d’écran Facebook

La Cocarde, succursale du Rassemblement National ?

Sur Besançon, la petite équipe cache difficilement son étroite proximité avec le mouvement Lepéniste. À sa tête se trouve ainsi l’étudiant en Histoire Théo Giacone, membre au bureau du Doubs et candidat sous cette étiquette aux dernières municipales, départementales et régionales. Auprès de lui officie Jean-Baptiste Batifoulier, en Droit, ayant concouru à autant de scrutins que son alter-ego, et un temps dirigeant de « Génération Nation » (GN) pour le Jura. Avant de claquer la porte du RN à l’été 2021, afin de rejoindre les rangs d’Éric Zemmour pour les présidentielles.

Deux autres compères achèvent le portrait de famille. Si Steven Fasquelle est en charge du secteur nord de la région, il s’avère également à l’œuvre sur Besançon. L’étudiant en pharmacie est référent GN du Doubs, mais aussi habitué des campagnes électorales et d’ailleurs conseiller à la mairie de Flagey-Rigney. Reste enfin Florise Prétet, en Droit, plus effacée, qui avait préféré le controversé Jean-Philippe Allenbach en 2020. Une adhésion donc large et incontestable au RN et à ses ramifications, l’association régulière d’actions couronnant le jumelage avec la « Cocarde. »

Mais au-delà de cet ancrage déjà litigieux, d’autres interrogations ont également surgi ces dernières semaines. Ainsi que vient de le révéler la plateforme « Dijoncter », Théo Giacone est soupçonné d’avoir gravement dérapé à plusieurs occasions. Outre une photographie aux relents discutables exhumée de son compte Facebook, ses éventuelles connivences avec la mouvance néonazie sont désormais pointées du doigt. L’accusation est certes lourde, mais fait également écho à la participation de membres dijonnais au commando du 31 janvier 2021 selon la même source.

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Photographie de Théo Giacone, publiée le 30 juillet 2019 sur son compte Facebook

« Un cancer contre notre patrie. »

Dans la même lignée, une flopée de déclarations éclairantes sont remontées. Via Twitter et Telegram, Théo Giacone apprécie relayer le blog « FdeSouche » et le canal « Ouest Casual. » Ainsi que ses occupations nocturnes : mise en scène de l’arrachage d’affiches « LV » qualifiées de « propagande bolchevique », signalement d’une campagne féministe de PDA taxée de « cancer pour notre patrie », mécontentement face à la politique migratoire d’Anne Vignot en exigeant de « rendre la France aux français », en sont autant de manifestations quotidiennes.

Celles de Jean-Baptiste Batifoulier ne sont pas plus pondérées : poses photographiques avec les RN Julien Oudoul, Philippe Vardon et Gilbert Collard, hommage à Jean-Marie le Pen sobrement présenté comme un « lanceur d’alerte » le 17 avril 2019, commentaires choquants à propos d’un fait divers le 16 janvier 2020 : « Des descendants de Louis 14 […]. Ils font ce que leur prophète a toujours fait : pillage, esclavage et viol. […] » Le partisan de « Reconquête » n’est pas vraiment entravé par la fameuse « police de la pensée », qui sévit davantage du côté de Vincent Bolloré.

Les compères s’inscrivent en cela dans les thèses défendues par la « Cocarde Étudiante » au niveau national, dont les supports distribués ou placardés y compris à Besançon reflètent cette volonté de « croisade » contre l’ennemi « étranger » ou « gauchiste. » Aux Universités de Nanterre, Tolbiac, Assas, Tours, Lille, Poitiers, ou encore Lyon, violences et polémiques traduisent les conséquences d’un enracinement de ce « syndicat. » Besançon n’échappe donc pas au phénomène. Alors que les griefs s’amoncellent, ce panorama soulève aujourd’hui autant l’inquiétude que l’indignation.



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