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Travail saisonnier, patron sexiste



Alors que les vendanges commencent et que « les vendangeurs sont aux petits oignons » comme titrait le BP cet été, voici le témoignage d’une saisonnière qui travaillait dans les vignes de Morey Saint Denis ce printemps.

Je suis arrivée pour chercher du travail dans les vignes et j’ai trouvé du travail à Morey Saint Denis dans le domaine G. J’ai travaillé deux mois, mais ca n’a pas été une bonne expérience. Beaucoup de fois je me suis sentie maltraitée par lui, avec des choses qu’il m’a dit, des situations comme quoi "je suis une fille, je suis espagnole, je parle pas très bien la langue" donc je suis… de la merde .

Tu fais les saisons, tu es arrivée comment ?

Je suis arrivée ici pour chercher du travail, et un collègue de l’année passée avec qui j’ai travaillé pendant les vendanges m’a dit qu’on peut chercher du travail ensemble et on a trouvé chez N. pour travailler dans la même équipe. L’année dernière on a fait les vendanges dans un autre domaine et on est restés sur le terrain de ce propriétaire. Nous, on a le camping-car et une petite tente alors il a dit oui... on est à cinq minutes du domaine de M. G.

Je suis passée par des situations où il m’a dit que comme j’habite dans une tente je suis sale, je suis une personne qui se drogue, et "comment je fais pour vivre comme ça ?", parce que je suis une fille et que je voyage avec mon sac, "comment je fais pour voyager comme ça ?", si je fais un travail, je sais pas... comme si j’étais une pute. Et il me dit un jour qu’il veut m’inviter, me propose d’aller au restaurant avec lui, avec deux personnes qui parlent l’anglais et comme je parle l’anglais il me dit "tu peux venir avec moi au restaurant comme..." , il a pas utilisé ces mots mais il dit une chose comme si j’allais y aller comme dame de compagnie, comme dame de compagnie c’est comme une pute. « Tu peux venir avec moi » , il a utilisé d’autres mots mais je sais pas quels mots car je les connais pas en français , « tu peux venir avec moi, je te prête les vêtements, et tu viens avec moi. Tu parles l’anglais, tu peux manger, tu peux venir avec moi ». Voilà ça dans la vigne, dans la vigne en travaillant, des choses comme ça. Il me dit que comme je suis une fille "pourquoi je travaille ?" Je dois rester chez moi, je dois m’occuper de la maison, laver les plats et faire à manger et blablabla. Et comme je suis dans le camping-car avec mon collègue et que mon collègue c’est un garçon, il me dit que je dois faire la cuisine et faire à manger pour lui parce qu’il est un garçon et comme je suis une fille, je dois faire ces choses. Je dois rester dans le camping-car et faire les choses pour lui, tout le temps. C’est des choses comme ça qu’il me dit, et ça c’est la dernière chose qu’il m’a fait. J’ai réfléchi après ça, j’ai fermé ma bouche au travail, beaucoup. Il ne veut pas que je travaille toute seule. Il me parle comme si je suis un chien , un chien , « Maria , à côté de moi ! ; à côté de moi , ici , à côté de moi » , tout le temps , « Maria tu travailles à côté de moi ! »

En faisant un signe comme ça ?

Oui oui , et si je prends une autre ligne qui n’est pas à côté de lui , il me change. « Non non , tu ne vas pas là-bas ,tu... à côté de moi » . Et si je vais un peu plus vite que lui, il me dit que non, que je dois aller plus doucement, que pour lui c’est stressant que je vais plus vite que lui parce qu’il veut aider moi tout le temps dans les lignes. Et si je vais plus vite il peut pas, il peut pas, il me dit « Maria tu peux prendre ton temps, mais aller plus doucement sinon je me stresse beaucoup avec toi » .( rires )

Donc lui il travaille à côté de toi et il te parle ?

Il me parle de toutes les choses que je dis, il y a des jours c’est vrai, il y a des jours qu’il fait les choses bien avec moi, il parle bien avec moi mais il y a beaucoup de jours que non et beaucoup de situations que je dois fermer ma bouche car je comprends rien du tout. Parce qu’avant, quand on a commencé le travail, comme je parle pas beaucoup le français, j’ai pas bien compris et lui il fait beaucoup de blagues et moi je comprends pas. Mais avec le temps, je commence à comprendre plus et quand il parle avec moi il manque mon respect, il manque le respect avec moi, tout le temps, tout le temps tout le temps beaucoup de fois beaucoup de fois.
Et un jour on travaille avec la pioche, et j’ai allé jusqu’à pleurer, parce que toute l’équipe on commence à faire la pioche avec lui, avec le patron. Quand je suis dans ma ligne à faire la pioche mon collègue de travail il va m’ aider et les autres aussi. Le patron arrête mon collègue de travail et dit « Maria on ne va pas l’aider, elle doit faire toute seule sa ligne et on continue les autres lignes parce qu’on est allé plus vite et elle est allée doucement ».
C’est frustrant pour moi car si on travaille ensemble et on est une équipe de travail, si il y a une personne qui est allée plus doucement et l’autre a fini, tu peux aller aider ton collègue. Et c’est frustrant de regarder les autres travail travail travail et toi tu peux pas. Le sentiment que j’ai été dans cette situation c’est très mal, je me sens très mal parce que je pense pourquoi, pourquoi eux peut pas m’ aider et ensuite commencer une autre ligne ensemble. Je pense que c’est logique, tu peux pas abandonner ton collègue de travail comme ça . ..et moi je suis dans la ligne et comme je suis dans la ligne pas mal de temps, moi je peux pas boire de l’eau. Les autres ils attendent, boire de l’eau et moi comme je suis dans ma ligne je peux pas arrêter pour faire rien, je dois continuer le travail et finir ma ligne .

Et avec les autres filles ça se passe comment ?

Les autres filles, c’est sa femme, sa mère et une dame qui travaille avec ce domaine depuis 20 ans.

Et les garçons ?

C’est mon ami, on était seulement 2 saisonniers. Avec lui, c’est meilleur qu’avec moi. On parle de ça beaucoup de fois, je lui ai dis « pour toi, c’est plus facile que pour moi, pour moi c’est très frustrant ». On arrive au camping très fatigué.es, pas par le travail, par la situation. Le travail pour moi c’est bon, c’est dur mais on travaille, mais avec cette situation, cette frustration que je peux pas répondre normalement, comme par exemple toi tu peux répondre plus vite, dans le même moment tu peux répondre. Mais moi, je l’écoute, je le comprends et après je dois penser. C’est un type bizarre, et sa femme dit rien du tout, elle parle pas et si elle parle elle continue la blague de son mari. Je me souviens maintenant d’une autre situation. Un jour on regarde une personne avec le tracteur faire les traitements dans les vignes, et le conducteur c’est un garçon avec pas de tee shirt et on pense mais il est fou, avec les traitements, il est fou, et on parle de ça et il me dit « Oh Maria demain tu veux venir avec moi comme le garçon avec pas de tee shirt, tu veux venir avec moi ? », et après je dis « euh non », j ‘ai dit « non non c’est pas nécessaire » par contre j’ai dis « moi je veux apprendre à conduire un tracteur » et la femme me dit, « si tu veux pas aller comme le garçon tu peux aller dans les jambes de Nicolas sur le tracteur ». Je sais pas si c’est une blague, mais je me dis c’est pas possible et un jour il me dit qu’il veut ouvrir un bordel , qu’il veut prendre des filles espagnoles comme moi, et qu’il veut me donner une invitation à travailler dans le bordel. A ce moment je sais pas , je lui réponds pas car je pense c’est pas nécessaire, 1re c’est pas nécessaire et deuxième j’ai pas la vitesse pour répondre.

Et comment tu as décidé de partir ?

Cette situation c’est bizarre j’ai jamais passé par une situation comme ça, pour moi c’est la première fois que je suis dans une situation comme ça avec machisme et racisme , c’est comme ça on appelle les choses par leur nom . C’est difficile pour moi parce qu’ il y a des jours qu’il est bon avec moi et il y a des jours que non. Il y a des jours qu’il est bon et je me dis je peux rester un petit peu plus, si c’est pas tout le temps comme ça.

Moi j’ai dit le lundi que je veux partir, c’est pas quand il a dit les choses plus graves, mais quand il m’a dit que je suis une fille et que je dois rester à la maison. C’est pas les choses plus graves mais pour moi c’est la dernière, c’est ma limite, j’ai pensé c’est bon , ça va !

Ca c’était lundi matin. A midi j’ai parlé avec mon collègue et avec ma mère : elle m’a dit " aujourd’hui tu prends tes affaires, aujourd’hui mais pas demain, pas demain pas le vendredi. Aujourd’hui et s’il te demande pourquoi, tu lui dis". Après j’ai réfléchi et j’ai pensé que non. Je suis allée lui dire que j’arrête le vendredi pour qu’il a le temps de faire la documentation, il a toute la semaine pour faire la documentation , chercher une autre personne, peut- être c’est un problème pour lui .. mais maintenant je pense que .. c’est parce que je suis idiote. J’ai décidé de partir parce que c’est pas bon pour moi, pour mon énergie , pour ma personne, pour mon respect, avec moi, comme fille comme personne comme tout et pour ça j’ai arrêté.

J’ai parlé avec le chef d’équipe le mardi à midi pour manger et l’après midi il parle pas avec personne. Le chef d’équipe c’est un ami de lui, je pense que lui parler c’est pas arrivé à rien du tout. Pour ça je lui ai dit "s’il te plaît dis lui pas des choses maintenant parce que peut-être c’est mal pour moi".
Le mercredi il me parle pas à moi, rien du tout ni regarder, rien. Avec les autres il parle un petit peu mais tu le sens quand une personne il est tendu, et après le jeudi il fait les choses bizarres.
Mon collègue me dit « je suis sûr qu’ils ont parlé ensemble de cette situation ».
Il arrête moi à 9h et demi et le vendredi il arrête moi à 11h et demi. Le reste de l’équipe continue le travail mais comme moi j’ai dit que j’arrête le travail le vendredi il m’arrête avant le reste de l’équipe ... le reste de l’équipe continue le travail et moi je dois aller à chez moi. J’ai fini le travail et personne me dit au revoir, personne me dit bon travail, rien du tout.



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